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En campagne

22 juin 2009 1 22 /06 /juin /2009 03:24



Le RSA est un leurre !

 

Pourquoi considérer le RSA comme un leurre ?

Parce qu’il est l’avant-garde de la politique voulue par Nicolas Sarkozy, et que celui-ci se charge de la faire porter en l’occurrence par Martin Hirsch haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

Il en est de la misère comme de la richesse : elle doit toujours profiter aux mêmes.

 

Le RSA est bien loin des annonces faites dans les médias.

Démonstration en quatre étapes.

 

En premier lieu le RSA est un système qui permet de remettre à l’ordre du jour les valeurs religieuses que Nicolas Sarkozy souhaite faire émerger en France.

En cela le combat contre la laïcité engagé par ce gouvernement s’inscrit insidieusement dans celui mené pour imposer le RSA.

 

« La famille d’abord », c’est la politique de protection  sociale voulue par Nicolas Sarkozy. Ce message n’assume pas l’égalité devant le droit au sein de la société française, mais disculpe l’Etat en le désengageant de ses responsabilités.

En ce sens le décret 2007 – 876 du 14 mai 2007 voté une semaine après l’élection du nouveau Président, a modifié deux textes du Code de la sécurité sociale et du Code de l’action sociale respectivement relatifs à l'allocation parent isolé et au RMI.

Le texte précise : toute personne qui demande à bénéficier de l'une ou l'autre de ces prestations, et qui "a des droits à des créances  d'aliments" est tenue de les faire valoir, dans un certain délai, sauf dispense qui peut lui être accordée par la CAF, sous peine de voir réduites ses allocations.

 

Dans les faits l'allocation parent isolé (API) et le RMI deviennent subsidiaires de l'obligation alimentaire familiale.

 

Que recouvre la notion de subsidiarité ?

 

Nous retrouvons cette notion dans le management d’entreprises : 

« … tout échelon supérieur s'interdit de réaliser lui-même ce qu'un échelon inférieur pourrait faire. La mise en œuvre du principe de subsidiarité conduit donc à un principe capital : l'autonomie ; celle-ci est probablement l'élément fondamental de la nouvelle structure des entreprises de demain »

« Le monde des affaires », le 18 février 1989. Jean René Fourtou.

 

Si l'on saute quelques siècles et quelques philosophes, c'est à Pie XI dans Quadragesimo anno de 1931 que l'on doit la première formulation du principe de subsidiarité :« De même qu'on ne peut enlever aux particuliers pour les transférer à la communauté, les attributions dont ils sont capables de leur seule initiative et par leurs propres moyens, ainsi ce serait commettre une injustice, en même temps troubler de manière dommageable l'ordre social que de retirer aux groupements d'ordre inférieur, pour les confier à une collectivité plus vaste et d'un rang plus élevé, les fonctions qu'ils sont en mesure de remplir eux-mêmes ».

Depuis cette date, la référence au principe de subsidiarité est devenue une constante dans l'enseignement de l'Eglise.

 

 

C’est avec une grande subtilité que ce vocable passe de manière anodine dans la mise en œuvre des politiques sociales actuelles.

On glisse tranquillement de la  solidarité nationale à la solidarité familiale obligatoire.

 

Il faut également considérer les articles 205 à 207 du code civil pour se rendre compte que l’obligation alimentaire ne connaît pas de limite générationnelle.

L’obligation alimentaire c’est l’obligation légale par laquelle les personnes (famille proche) d’une même famille sont tenues de fournir à d’autres personnes (parents, enfants, conjoints..) les moyens nécessaires pour vivre.

Glissement.

 

L’APA (Allocation Personnalisée d’Autonomie) qui fonctionne déjà sur le principe de subsidiarité a déjà produit ses effets et des recours entre ascendants pour régler les frais de gardes ou de maison de retraite sont effectifs. A noter rapidement un des effets collatéraux à vouloir traiter le social par le judiciaire... on encombre les tribunaux.

 

Dans le système mis en place pour l’APA ou le RSA, l’Etat ne se reconnaît plus garant de l’obligation d’assurer à chacun des conditions d’existence et de dignité, par le respect de l’accès aux droits de chaque citoyen.

.

Le choix fait par le gouvernement est clairement de laisser à chacun le soin d’assurer par la richesse sa dignité ou celle des siens.

Le principe de solidarité nationale, de protection sociale généralisée sont est ainsi mis à bas.

C’est la sécurité sociale qui en prend encore un coup au passage! Ce qui est un objectif en soi.

 

Il n’est pas négligeable à cet endroit de citer Jean-Paul II en 2006 « Citations-148 Lettre aux familles (2-II-1994), n. 16, §8 »

Les parents sont les premiers et les principaux éducateurs de leurs enfants et ils ont aussi une compétence fondamentale/ dans ce domaine : ils sont éducateurs parce que parents.

Ils partagent leur mission éducative avec d'autres personnes et d'autres institutions, comme l'Eglise et l'Etat ; toutefois cela doit toujours se faire suivant une juste application du principe de subsidiarité. En vertu de ce principe, il est légitime, et c'est même un devoir, d'apporter une aide aux parents, en respectant toutefois la limite intrinsèque et infranchissable tracée par la prévalence de leur droit et par leurs possibilités concrètes. Le principe de subsidiarité vient donc en aide à l'amour des parents en concourant au bien du noyau familial. En effet, les parents ne sont pas en mesure de répondre seuls à toutes les exigences du processus éducatif dans son ensemble, particulièrement en ce qui concerne l'instruction et le vaste secteur de la socialisation. La subsidiarité complète ainsi l'amour paternel et maternel et elle en confirme le caractère fondamental, du fait que toutes les autres personnes qui prennent part au processus éducatif ne peuvent agir qu'au nom des parents, avec leur consentement et même, dans une certaine mesure, parce qu'ils en ont été chargés par eux.

 

On s’aperçoit alors qu’elle est l’essence même de ce décret d’application !

 

En d'autres termes, l’API et le RMI deviennent subsidiaires de l'obligation alimentaire familiale.

A quand le versement de dividendes subsidiaires aux placements des actionnaires !

Le rapprochement entre les textes de l’Eglise et le glissement rapide vers le principe de subsidiarité que le pouvoir en place administre est symptomatique de la teneur que Nicolas Sarkozy souhaite donner au lien social : l’Etat ne se reconnaît plus l’obligation d’assurer à chacun des conditions d’existence dans la dignité. L’Etat renvoie la charge, donc la responsabilité de l’égalité et ce de façon intergénérationnelle, à la famille.

 

Selon que tu seras riche ou pauvre…

 

Un  point essentiel à cet endroit est de considérer que la solidarité familiale est de l’ordre du privé alors que l’intérêt général de la population, entre autre la protection sociale, elle, est du rôle de l’Etat. L’Etat a un devoir d’égalité de traitement et de redistribution.

 

Il est donc facile de se rendre compte que le combat pour la laïcité ne se situe pas dans l’arbitrage du religieux. Ce combat est le garant de la laïcité comme principe politique, accompagné d’un corpus de textes législatifs qui doivent empêcher ce type de dérapages.

 

Les mêmes droits reconnus à l’ensemble d’une population, lui confèrent le statut de peuple. L’individualisation des droits reconnaît chaque citoyen comme l’un des membres de ce peuple. Recourir au principe de subsidiarité familiale ouvre la porte à la reconnaissance de droits sociaux « claniques » et renverra bientôt chaque communauté à ses propres moyens de subsistance. Lutter contre la subsidiarité en matière de droits sociaux c’est refuser le glissement vers le communautarisme … fût-il … familial !

 

En second lieu il semble opportun de reprendre les propos de Nicolas Sarkozy sur ces thématiques.

Il confirme par ses écrits que le fait religieux serait une valeur ajoutée, un supplément d'âme apportés à la République.

« la République [...] ignore le bien et le mal. [Elle] défend la règle, la loi sans la rattacher à un ordre moral ».

"La République, les religions et l'espérance". Nicolas Sarkozy

Les valeurs religieuses pourraient donc se substituer aux choix politiques ?

La règle, la loi ne sont entendues ici que comme objets de répression. La loi qui protège et qui fonde un projet de protection sociale et de solidarité nationale, elle, n'existe pas (plus !).

Les élus du peuple qui élaborent le droit ne sont-ils à même que de réprimer un manquement à l'ordre moral, instauré par le religieux ?

Est-ce la voie ?

La République devient garante du respect des règles qui sanctionnent le manquement à l'ordre moral religieux, et doit renoncer à être le cadre institutionnel permettant la mise en oeuvre des principes qui la fondent : la liberté, l'égalité et la fraternité ?

Pour Nicolas Sarkozy, aidé en cela par Martin Hirsch, le combat contre la laïcité passe donc aussi par la mise en œuvre de mesures « prétextes » comme ce RSA new look !

 

En troisième lieu il faut aussi remarquer que cela incite à la culpabilisation des individus.

Cela incite à la culpabilité d’être pauvre, mais surtout cela incite à la culpabilité de devoir s’assumer.

Est sous jacente la question du droit des femmes.

Serait-on en train de nous faire revenir benoîtement vers la responsabilisation du mari sur la femme ?

Tout ça fleure bon la vieille France et le code des familles.

La France a su à travers son histoire faire un équilibre entre la responsabilité individuelle et la responsabilité collective.

Il nous est simplement proposé de revenir en arrière.

 

Enfin en quatrième lieu il faut écouter ce que disent les médias pour promouvoir le RSA : le RSA assure un complément de revenu.

Suprême argument.

La valeur travail est ici bafouée.

C’est à dire que certains ne doivent  plus gagner leur vie en travaillant, parce que le politique n’est plus capable de répondre aux besoins premiers d’une société.

L’abandon des principes de solidarité, renvoyé au principe de subsidiarité va détruire les liens sociaux qui existent encore dans notre société et en particulier le lien de solidarité. A partir de là le tissu social se décompose et l’ordonnancement de la société sur des valeurs individualiste sera plus simple.

Au final nous avons devant les yeux une aide déguisée aux entreprises dans un premier pour finalement faire baisser les bas salaires.

Et le jour où le RSA ne répondra plus à ces critères ?

Cet objectif à moyen ou long terme est particulièrement vicieux mais sera n’en doutons pas efficace...le principe de réalité nous le rappellera en temps utile.

 

L’abandon des politiques sur ces sujets est une catastrophe.

 

Nous vivons une époque dangereuse.

Réveillons nous !

Pour des combats humains.

 

 

Dominique Mourlane



Le RSA, machine à fabriquer de la précarité

par Robert Castel

Le revenu de solidarité active (RSA) implanté sur l'ensemble du territoire depuis le 1er juin est présenté comme la grande mesure sociale de la présidence de Nicolas Sarkozy. De fait, il a déjà et va sans doute avoir de plus en plus une importance considérable. Remplaçant à la fois le RMI, l'allocation parent isolé (API) et la "prime pour l'emploi" attribuée à des familles de travailleurs pauvres, il concerne, dès à présent, près de 7 millions de personnes, bénéficiaires directs et leurs familles.

Le RSA poursuit un double objectif. En direction des anciens allocataires du RMI et de l'API, il entend les inciter au travail en rétribuant toute activité, même la plus minime, sans qu'ils risquent de perdre leurs droits. Du côté des travailleurs pauvres, il procure un complément de ressources aux ménages qui restent au-dessous du seuil de pauvreté bien qu'ils travaillent.

Le RSA paraît ainsi répondre à deux exigences prioritaires dans la conjoncture sociale actuelle : réduire le nombre des personnes privées d'emplois et faire que celles qui travaillent en tirent un revenu à peu près décent. Il va, à coup sûr, améliorer la situation de plusieurs centaines de milliers de personnes parmi celles qui en ont le plus besoin.

Il faut le reconnaître pour se garder des condamnations désinvoltes. Mais cela n'interdit pas de s'interroger plus avant sur les effets que la généralisation du RSA va entraîner au-delà des avantages que vont immédiatement en tirer les bénéficiaires.

D'anciens allocataires du RMI vont, grâce au RSA, renouer avec le travail, mais dans la plupart des cas il s'agira d'emplois médiocres, à durée limitée. Ils seront donc pour une part des travailleurs touchant un petit salaire, tout en continuant à dépendre de la solidarité nationale. Curieuses situations dans lesquelles les frontières entre travail et assistance se brouillent.

On peut être à moitié (ou au quart ou aux trois quarts) un travailleur et à moitié (ou au quart, ou aux trois quarts) un assisté. C'est à coup sûr une condition très inconfortable. Mais c'est surtout une énorme régression par rapport au statut classique de l'emploi assurant avec un salaire décent et une situation stable les conditions de l'indépendance économique et de la dignité sociale des travailleurs.

La même déficience par rapport à une condition salariale à part entière se retrouve du côté des travailleurs pauvres. Le RSA s'attaque exclusivement à la dimension monétaire de la pauvreté en octroyant une compensation financière (fort modeste d'ailleurs, de l'ordre de 60 euros mensuels en moyenne par ménage).

Il prend ainsi acte de la dégradation de l'emploi qui subsiste comme telle. Le rapport de la "commission Hirsch" de 2005, qui présentait le projet du RSA, avait pourtant signalé que la précarité des emplois était la cause principale de la pauvreté laborieuse. Mais le RSA actuel se contente de prendre cette pauvreté comme un état auquel on attache une prime.

Ainsi on pourrait dire que le RSA entérine la précarité. Mais il risque aussi de l'étendre. Ses bénéficiaires privés d'emplois sont incités à prendre n'importe quel type d'activité même la plus ponctuelle, puisque à juste titre, elle sera rémunérée. Mais c'est en même temps une incitation, du côté des employeurs, à maintenir et à proposer des emplois à bas salaires et à temps partiel puisque les salariés qu'ils recruteront ainsi seront déjà en partie subventionnés. C'est une opportunité de trouver des travailleurs en solde sur le marché du travail.

Les expériences précédentes d'allégement des charges patronales montrent que les employeurs savent tirer profit de ces effets d'aubaine. Or rien n'est prévu dans le dispositif du RSA pour les contraindre ou les contrôler. On a parlé de "trappes à inactivité" pour dénoncer les soi-disant excès de protections publiques qui désinciteraient les personnes déjà indemnisées à chercher du travail. On pourrait peut-être parler de "trappes à bas salaires" ou de "trappes à précarité" pour désigner de telles situations d'emplois dégradés.

Ne soyons pas injustes : ce n'est pas d'abord la faute du RSA, ce n'est pas lui qui a commencé. Ces dérives sont sous-tendues par une puissante dynamique qui a actuellement le vent en poupe et qui fait du travail un impératif catégorique auquel on doit se plier à n'importe quelles conditions. S'il faut absolument travailler, on ne saurait être trop regardant sur la nature du travail proposé ou imposé. Car il n'y a pas d'autre alternative au travail que d'être un misérable assisté qui vit aux dépens de la France qui se lève tôt ou un "chômeur volontaire", manière euphémisée de nommer un fainéant.

Le RSA n'a pas inventé ce scénario, mais il risque de s'y inscrire. Il a été inspiré par la volonté humaniste de son promoteur, Martin Hirsch, déterminé à améliorer le sort des plus démunis. Mais il risque de servir une volonté politique toute différente, pour ne pas dire opposée.

C'est le président de la République lui-même qui, dans son discours de Valenciennes le 25 novembre 2008, déclarait : "Le RMI, on pouvait l'avoir sans condition, le RSA, à deux offres d'emplois refusés, plus de RSA. Il y a tant de gens qui souffrent alors qu'ils n'y sont pour rien, celui qui ne veut pas s'en sortir on ne peut pas l'aider." On n'en a pas fini de stigmatiser les mauvais pauvres, ceux qui ne travaillent pas, étant entendu que s'ils ne travaillent pas c'est de leur faute.

Il ne faut pas pour autant tuer le RSA, ne serait-ce que parce qu'il vient de naître et qu'il a une longue vie devant lui. De plus il a le mérite de donner un plus à ceux et à celles qui ont le moins, ce qui n'est pas peu. La question désormais est de savoir s'il est possible, et dans quelle mesure, de pallier les risques qu'il porte. Pour ce faire, deux exigences au moins doivent être posées et défendues avec détermination.

La première est qu'un accompagnement réel aide effectivement les bénéficiaires du RSA dans leur parcours. Un véritable suivi personnalisé pour la recherche d'un emploi de qualité et non l'exercice d'un chantage pour faire accepter n'importe quel travail. La seconde exigence est que le RSA cesse de se présenter comme la mesure phare des politiques sociales qui serait apte à assumer l'essentiel des problèmes que posent le non-emploi et l'emploi dégradé.

Il pourrait jouer sa partition au sein d'une politique salariale globale et volontariste prenant en charge, entre autres, la formation à l'emploi, la sécurisation des parcours professionnels, les responsabilisations des employeurs pour promouvoir des emplois de qualité. C'est à ces conditions que le RSA pourrait contribuer à combattre la précarisation et la paupérisation du travail, faute de quoi il va les institutionnaliser.


Robert Castel est sociologue, directeur d'études à l'EHESS.

 

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