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5 novembre 2009 4 05 /11 /novembre /2009 03:34



 

L'AVIS DU HAUT CONSEIL DES BIOTECHNOLOGIES SUR LE « SANS OGM »

 http://goudouly.over-blog.com/article-avis-sur-le-sans-ogm--38669811.html


Sur Inf’OGM

VEILLE CITOYENNE D’INFORMATIONS CRITIQUES SUR LES OGM

CONTEXTE ET ENJEUX

 

Le 3 novembre 2009, le Haut conseil des biotechnologies (HCB) présentera en conférence de presse son avis sur la qualification « sans OGM ». Cet avis intervient conformément à l’article 2 de la loi du 25 juin 2008 sur les OGM (1), qui prévoit que les OGM ne peuvent être utilisés que dans le respect « des filières de productions et commerciales ‘ sans OGM ‘ ». Il reviendra ensuite aux ministères d’arrêter la définition de cet étiquetage.

Cette qualification pourrait s’attacher :

         - aux produits végétaux ;

         - et aux produits issus d’animaux qui n’auraient pas été nourris avec des OGM.

 

Les enjeux de la qualification « sans OGM »

 

La définition du « sans OGM » conditionnera les règles de coexistence des cultures GM et non GM. Ces règles devraient être définies courant 2010, après avis du seul comité scientifique du HCB.

Cet étiquetage contribuera à définir la qualité de l’information pour le consommateur. A l’heure actuelle, l’étiquetage des OGM ne concerne que les produits qui contiennent des OGM au delà de 0,9% (cf. encadré en page 2). L’étiquetage actuel ne garantit donc aux consommateurs qu’une présence d’OGM inférieure à 0,9%.

Avec un étiquetage pour les  produits issus d’animaux non nourris avec des OGM, le lien entre OGM et alimentation animale est pour la première fois établi pour le consommateur.

Les protéines végétales (le soja notamment) tiennent une place majeure dans l’alimentation animale européenne, et sont fortement concernées par la problématique

OGM (60% des cultures mondiales de soja sont génétiquement modifiées).

Actuellement, sur les 4,5 millions de tonnes de soja importées pour le bétail français, seul 1/5 est certifié non-OGM. Malgré cela et jusqu’à nos jours, l’alimentation génétiquement modifiée des animaux n’a fait l’objet d’aucun étiquetage sur le produit

final.

L’étiquetage du « sans OGM » encouragera l’émergence d’un véritable marché du soja non OGM. Avec cet étiquetage, la France valorisera les efforts considérables des producteurs qui avaient déjà fait le choix de ne pas utiliser d’OGM dans l’alimentation des animaux. Un tel étiquetage constituera un signal fort adressé aux producteurs américains de soja. A l’heure actuelle, et comme le rappelle le GIET (Groupement

international d’études transdisciplinaires), « toute une partie de la production brésilienne de soja non GM, se trouve, après récolte, mélangée à du soja GM » car maintenir une filière non génétiquement modifiée nécessite des investissements (silos, camions, conteneurs séparés...) (2).

Pour engager ces investissements, il faut que les fournisseurs brésiliens puissent tabler sur une demande européenne garantie de soja non OGM.

 

La situation actuelle du « sans OGM » en France

 

- Pour les produits végétaux, c’est une note d’information de 2004 de la DGCCRF (3) qui régit l’étiquetage sans OGM. Sous ce régime, ne peuvent être étiquetés « sans OGM » que les produits susceptibles de contenir des éléments issus de PGM (soja, maïs, coton, colza...), et qui peuvent garantir une présence d’OGM inférieure au seuil de détection (0,01%). Le maïs doux et les pousses de soja bénéficient d’un régime d’exception : bien qu’ils ne soient pas susceptibles de contenir des OGM (aucun maïs doux n’est autorisé à la commercialisation et les pousses de soja ne sont pas du soja mais des haricots mungo), il leur est possible d’inscrire « sans OGM, conformément

à la réglementation », pour pallier les risques de confusion sur leurs produits.

Outre ces exceptions, on trouve dans les rayons quelques produits végétaux étiquetés « non OGM », notamment tofu et lait de soja « issu de filières non OGM ». Cet étiquetage est conforme à la note de la DGCCRF de 2004, mais reste confidentiel car très difficile à garantir.

 

- Pour l’étiquetage des produits issus d’animaux, selon la note d’information de 2004, une allégation sur les OGM ne peut porter que sur l’alimentation donnée aux animaux, et sous réserve qu’elle respecte les exigences précitées (moins de 0,01%). Le caractère extrêmement strict de cette note a conduit à ce qu’aucun produit issu d’animaux ne puisse être étiqueté « sans OGM », en dépit les efforts de certaines filières animales.

Malgré cette note, en juin 2009, on a vu fleurir dans les supermarchés un étiquetage sans OGM sur les produits Loué. Les volailles et les oeufs ont été marqués d’étiquettes « nourri sans utilisation d’OGM* », le renvoi * précisant « minimum 99,1 %», cela alors même que la réglementation n’est pas encore adoptée.

Un étiquetage anticipé en forme de lobbying pour la prochaine réglementation...

Mais d’autres marques ont suivi cette démarche commerciale, le site Internet « Nourri sans OGM » les répertorie : la viande bovine Maine-Anjou, le fromage Laguiole, le porc fermier de la Sarthe, etc...

 

L’étiquetage « sans OGM » en Europe

 

Aujourd’hui, plusieurs pays européens ont déjà mis en place un étiquetage « sans OGM ». On recense pour l’heure : l’Allemagne, l’Autriche et l’Italie.

Mioctobre, le gouvernement Irlandais a annoncé sa volonté de mettre en place un tel étiquetage « pour optimiser les avantages compétitifs de l’Irlande ».

En mai 2008, l’Allemagne a adopté un étiquetage « ohne gentechnik » (« sans biotechnologie »). Pour les produits issus d’animaux, ils peuvent être étiquetés « sans OGM » si les animaux ont été nourris avec des aliments non étiquetés ou non tracés OGM (moins de 0,9% dans les aliments).

Critiqué pour son caractère trop souple (seuil de 0,9%, nourriture non OGM seulement pendant la dernière période de la vie de l’animal), cet étiquetage a été appliqué en octobre 2008 par la coopérative Campina, qui a lancé le lait de vache « ohne gentechnik ». Un an plus tard, l’entreprise annonçait que cet étiquetage avait dopé ses ventes de 7,7% (4).

Pour l’Autriche, des directives entrées en vigueur en 2008 retiennent également un seuil de 0,9% dans l’alimentation des animaux et l’alimentation non GM n’est pas exigée sur tout le cycle de la vie de l’animal (sauf pour l’aquaculture).

 

Ce premier avis du Haut conseil des biotechnologies intervient sur une notion très attendue et porteuse d’enjeux considérables. Cette qualification devra savoir concilier l’exigence de loyauté envers les consommateurs et les contraintes qui pèsent sur l'approvisionnement en aliment sans OGM.

Dans les mois à venir, il reviendra au gouvernement de décider s'il souhaite suivre ou non cet avis dans son intégralité.

 

OGM, alimentation et étiquetages

 

Les OGM sont peu présents directement dans l'alimentation humaine. Dans l’Union européenne, un produit n’est étiqueté qu’à partir d’un seuil de présence de 0,9% dans l’un des ingrédients. En dessous de 0,9%, l’étiquetage est également exigé lorsque cette présence n’est pas accidentelle ou techniquement inévitable. Du fait de l’opposition des consommateurs européens, seule une trentaine de produits est étiquetée OGM, et il s’agit principalement de produits importés des États-Unis et d’huiles de soja.

Mais les OGM pénètrent massivement la chaîne alimentaire via l’alimentation animale. Jusqu’à nos jours, aucun étiquetage ne permet au consommateur de savoir, si oui ou non, les produits sont issus d’animaux nourris avec des OGM. Seuls les produits biologiques apportent cette garantie, avec une tolérance de présence de 0,9% d’OGM dans l’alimentation du bétail. Certains labels rouges et marques privées fournissent le même effort (volaille de Loué, porc de la filière qualité Carrefour, viande bovine AOC Maine-Anjou, certains formages, etc.) mais ils ne peuvent légalement l’afficher directement eu égard à la réglementation existante.

 

 

Historique

 

Septembre 2007 : L'intergroupe du Grenelle de l'environnement demande l'adoption d'une loi sur les OGM déclinant notamment le principe du libre-choix de produire et de consommer sans OGM.

 

25 juin 2008 : La loi sur les OGM est publiée et prévoit en son article 2 : « Les organismes génétiquement modifiés ne peuvent être cultivés, commercialisés ou utilisés que dans le respect [...] des filières de production et commerciales qualifiées « sans organismes génétiquement modifiés », et en toute transparence. La définition du « sans organismes génétiquement modifiés » se comprend nécessairement par référence à la définition communautaire. Dans l'attente d'une définition au niveau européen, le seuil correspondant est fixé par voie réglementaire, sur avis du Haut Conseil des biotechnologies, espèce par espèce ».

 

Octobre 2008 : Premier étiquetage « sans biotechnologie » en Allemagne, sur un lait de vache commercialisé par Campina.

 

19 mai 2009 : Le Conseil national de la consommation rend son avis sur la qualification sans OGM, qui recommande l'étiquetage « sans OGM » des produits issus d'animaux. L'objectif est de valoriser l’utilisation d’aliments pour animaux non étiquetés, à savoir ceux contenant de façon fortuite ou techniquement inévitable moins de 0,9% d’OGM (5).

 

 

NOTES

1, http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000019066077

2, http://www.giet-info.org/articles.php?lng=fr&pg=109

3, DGCCRF, note d’information n°2004-113 du 16 août 2004

4, http://www.traceconsult.ch/index.php?option=com_content&view=article&id=139%3Aqgm-freeq-claim-boosts-campinas-landliebe-sales-by-77-percent&catid=47%3Anewsticker&Itemid=50&lang=en

http://www.minefi.gouv.fr/conseilnationalconsommation/

 

Inf’OGM, veille citoyenne d’information, est une association reconnue d’intérêt général, qui décrypte l’actualité mondiale et propose un service unique d’information francophone. Sa mission est de favoriser et de nourrir le débat démocratique autour des OGM et des biotechnologies par une information critique, contextualisée et indépendante, accessible au plus grand nombre.

 

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16 octobre 2009 5 16 /10 /octobre /2009 03:32
OGM: L'épreuve de vérité européenne
Volé sur 20 minutes


t-ogm.jpgL’environnement est de plus en plus une question européenne. Alors que le Conseil des ministres de l’Union Européenne va prochainement se prononcer sur une levée du moratoire français sur les OGM, la Cour de Justice Européenne vient de condamner la France à rendre public toutes les infos sur les lieux d’implantation des champs de culture OGM. Le retour des faucheurs…

Pierre Azelvandre est le type du genre tenace. Cet habitant de la commune de Sausheim, en Alsace, s’intéressait aux cultures OGM, et souhaitait savoir s’il en existait sur sa commune. D’où cette démarche simple : une demande au maire, dans le cadre de la loi sur l’accès aux documents administratifs. Depuis 1978, les collectivités publiques sont tenues de délivrer copie, sur simple demande, des documents administratifs publics qu’elles détiennent. D’où le courrier adressé le 21 avril 2004 par Pierre Azelvandre au maire: « Merci de bien vouloir me communiquer, pour chaque dissémination d’OGM ayant lieu sur le territoire de cette commune, l’avis au public, la fiche d’implantation, qui permet de localiser la parcelle complantée, et le courrier préfectoral accompagnant ces documents. »

Le maire n’ayant pas répondu dans les deux mois, l’ami Pierre a le 1er juin 2004 saisi laogm-j_5c_en-veux-pas-_.jpg Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) qui le 24 juin 2004, a rendu un avis favorable à la communication de l’avis au public et mais s’est prononcé contre la communication de la fiche d’implantation parcellaire et de la carte de localisation des disséminations, au motif que « cette communication porterait atteinte au secret de la vie privée et à la sécurité des exploitants concernés. »

Pierrot-le-pas-fou a reçu les premiers documents, et le 16 septembre 2004, il a saisi le tribunal administratif de Strasbourg pour obtenir le reste de la précieuse documentation. Par jugement du 10 mars 2005, le tribunal lui a donné raison. Le maire cachottier a formé un recours devant le Conseil d’Etat, qui a refilé la patate chaude la Cour Européenne de Justice, de Luxembourg, par le biais de ce qu’on appelle une « question préjudicielle ». Estimant que pour répondre à Pierre-qui-ne se fait-pas-rouler il fallait interpréter le droit européen, en l’occurrence les règles d’information en matière de dissémination d’OGM, a sursis à statuer, et interrogé la Cour Européenne de Justice.

martine-et-les-ogm.jpgEt la Cour a répondu ce 17 février 2009 (affaire C. 552/07), se fondant sur la directive 2001/18/CE du 12 mars 2001, avec une réponse en deux temps:

- Le lieu de la dissémination est déterminé par toute information relative à la localisation de la dissémination soumise aux autorités compétentes de l’État membre sur le territoire duquel cette dissémination doit avoir lieu.

- Une réserve tenant à la protection de l’ordre public ou à d’autres intérêts protégés par la loi ne saurait être opposée à la communication des informations.

Dans son mémoire, la France évoquait les troubles à l’ordre public, dans l’hypothèse où Pierre et ses petits copains seraient intéressés de connaitre les lieux de culture pour y passer la tondeuse. « Une réserve tenant à la protection de l'ordre public ne saurait être opposée à la communication des informations énoncées par la directive » et « la crainte de difficultés internes ne saurait justifier l'abstention par un Etat membre d'appliquer correctement le droit communautaire« , claironne la Cour.

La France a suspendu les cultures du maïs transgénique MON810 en février 2008 avec pour motif apparent « les incertitudes sur les risques potentiels » et pour motif sous-jacent une amourette avec les Verts. Mais la Commission européenne a demandé à la France de revenir sur cette décision, estimée non-fondée scientifiquement. Chercher un fondement scientifique à l'amourette... La phase préalable, devant le Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale, a été un échec ce 16 février, et la décision revient désormais au Conseil des ministres de l'Union Européenne.

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Bilan d'un Grenelle de l'amourette ?
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24 août 2009 1 24 /08 /août /2009 03:40





Nature & Progrès

Communiqué de presse, le 4 août 2009

Une nouvelle étude incomplète et inutile s'en prend à la bio

Selon une étude publiée par l’American Journal of Clinical Nutrition, les produits issus de l’agriculture biologique ne sont pas plus sains que les aliments ordinaires et n’offrent pas d’avantages nutritionnels supplémentaires, que ce soit en calcium, en fer ou en vitamine C. C’est la conclusion de l’étude réalisée, à la demande de la Food Standards Agency (l’agence alimentaire britannique), par des chercheurs de la London School of Hygiene & Tropica Medicine sur base de l’examen de 162 études publiées sur le sujet au cours des 50 dernières années.
Nature & Progrès s’étonne qu’une étude relative à l’alimentation issue de l’agricultrue biologique omette de tenir compte de la teneur en résidus de pesticides chimiques de synthèse et autres polluants présents dans les aliments  pour affirmer de tels propos et déplore le caractère simpliste de l’interprétation.
Pourquoi la qualité nutritionnelle est-elle mesurée seulement en fonction des apports des aliments en calcium, en fer et en vitamine C ? Comment ont été sélectionnées les 162 études alors qu’il en existe bien d’autres qui mesurent aussi les protéines, le phosphore, les anti-oxydants, etc ?
Pour entreprendre une comparaison du potentiel nutritionnel des aliments et leur action sur la santé, le facteur résidus de polluants est incontournable. L’ingestion de pesticides, même à l’état de traces, empêche la bonne assimilation des nutriments en agissant comme des anti-nutriments [1]. Ce qui veut dire que, même dans l’hypothèse où les produits conventionnels contiendraient autant de nutriments que les produits bio, la présence de résidus phytosanitaires empêche leur bonne assimilation.
Il existe des études qui démontrent que les produits bio possèdent des avantages nutritionnels de taille. N’oublions pas que la qualité nutritionnelle d’un aliment ne se mesure pas uniquement en terme de quantité, comme l’insinue cette étude, mais aussi en termes de qualité et de diversité.
Certaines études confirment que certains produits bio ne contiennent pas nécessairement plus de protéines mais elles indiquent aussi que celles-ci sont de meilleure qualité et que l’équilibre entre les différents nutriments y est supérieur. Par ailleurs, il est maintenant démontré, que les produits bio contiennent une quantité plus élevée d’antioxydants (polyphénol [2], caroténoïdes, flavonoïdes, etc) aux vertus immunostimulantes,  anticancéreuses   [3] et antidépressives.
Déjà en 1990, l’OMS publiait un rapport   [4] très complet sur l’ensemble des études épidémiologiques réalisées dans le monde sur les effets des pesticides sur la santé et épinglait des cas de maladies osseuses, de cancers, de malformations à la naissance, de maladies de peau, de dégradations des systèmes nerveux et immunitaires…
Les premières victimes de l’utilisation des produits chimiques dans l’agriculture sont les agriculteurs. Pour Nature & Progrès, ce seul constat imposerait déjà la conversion totale vers l’agriculture biologique.
Par ailleurs, l’impact de l’utilisation des produits phytosanitaires sur l’environnement est plus que préoccupant car ses produits contaminent notamment les nappes phréatiques et se retrouvent dans nos verres d’eau…
En conclusion, Nature & Progrès s’interroge vraiment sur le bienfondé de telles études et sur leur pertinence. Nous devrions tous nous réjouir de l’existence de  l’agriculture biologique qui :
·        Procure une alimentation de qualité au moins équivalente à l’agriculture conventionnelle mais sans recourir aux produits chimiques de synthèse
·        Assure la santé et une plus grande indépendance du monde agricole
·        Améliore notre environnement en respectant la biodiversité, sauvage et cultivée
·        Rencontre les attentes du grand public qui réclame une alimentation sans pesticides ou produits phytosanitaires de synthèse.

 Francis Giot
 Président de Nature & Progrès Belgique


[1] Etudes du Dr Béliveau, oncologue, professeur à l’Université du Québec à Montréal
[2] Etude comparée sur les polyphénols par Marie-Joséphine Amiot-Carlin, directrice de recherche à l’Institut national de recherche agronomique de Marseille, lors du FAV Health 2005, symposium international sur l’effet santé des fruits et légumes
[3] Etude sur les vitamines C et les polyphénols par la chercheuse Marie Olsson, de l’Université suédoise des Sciences Agronomiques
[4] Rapport OMS : http://whqlibdoc.who.int/publications/1990/9241561394.pdf



Lettre d'information du MDRGF

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Etude anglaise comparant aliments Bios et non Bios
les révélations du MDRGF reprises dans la presse ! En plus des 2 articles ci dessous, les révélations du MDRGF ont
aussi déjà été reprises par France Info et Europe 1...


Le bio c'est bon pour l'environnement et peut-être aussi pour la santé
http://www.afp.com



Le bio, c'est bon pour l'environnement, mais aussi pour la santé, assurent les défenseurs des produits issus de l'agriculture biologique, bien que les bienfaits pour la santé soient plus difficiles à prouver scientifiquement. Une étude britannique a relancé le débat en suggérant que l'avantage nutritionnel des aliments naturels, produits sans fertilisants ni pesticides, était négligeable. Les produits bios ne sont pas plus sains que les aliments ordinaires, leur apport nutritionnel étant assez similaire, ont estimé des chercheurs de l'Ecole d'hygiène et de médecine tropicale (LSHTM) de Londres dans cette étude publiée dans le Journal américain de nutrition clinique. Pour le Professeur Alan Dangour, principal auteur de l'étude, "il n'y a actuellement aucune preuve" justifiant de privilégier les produits bios sur les autres pour leur apport nutritionnel. "Mais il est également clair que la qualité des preuves rassemblées pour aboutir à ce jugement est faible", fait remarquer le prestigieux journal médical britannique The Lancet dans sa dernière édition. Pour cette méta-analyse, les chercheurs britanniques ont en effet brassé quelque 90.000 études scientifiques parues depuis 50 ans, en ont sélectionné 162 mais n'en n'ont finalement retenu qu'un tiers, considérées comme satisfaisantes, souligne The Lancet. En France, le MDRGF, une association qui se bat contre les pesticides, estime que l'étude britannique est "tronquée" car elle est basée sur 55 études seulement, choisies parmi les 162 retenues. Or l'analyse de ces 162 études "fait apparaitre des différences significatives favorables aux aliments bios pour 6 catégories de nutriments importants", affirme François Veillerette, président du Mouvement pour les droits et le respect des générations futures. Les végétaux bios contiennent notamment plus de magnésium, de zinc, de polyphénol ou de sucres que les cultures intensives qui contiennent, elles plus d'azote, précise-t-il. De même, les produits animaux bios contiennent plus de certains acides gras que leurs homologues non bios, ajoute-t-il. Des chercheurs de l'université de Californie avaient déjà montré en mars 2007 que la valeur nutritionnelle de kiwis issus de l'agriculture bio était supérieure à ceux de l'agriculture conventionnelle, les premiers contenant plus de polyphénol (censé lutter contre le cholestérol) et d'antioxydants (qui combattent le vieillissement des cellules) que les seconds. De son côté, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) a estimé en 2003 qu'il n'y avait pas de "différence remarquable (...) des teneurs en nutriments entre les aliments issus de l'agriculture biologique et ceux issus de l'agriculture conventionnelle". Une analyse qui est "toujours d'actualité", souligne une porte-parole de cette agence. L'Afssa a toutefois reconnu dans cette étude que "le mode de production biologique, en proscrivant le recours aux produits phytosanitaires de synthèse, élimine les risques associés à ces produits pour la santé humaine et concourt à une moindre pollution environnementale, notamment de la ressource en eau". Elle rejoint ainsi les défenseurs des produits naturels qui soulignent que l'absence de résidus de pesticides dans les aliments bios est un élément favorable à la santé. Mais "pour dire que le bio c'est bon pour la santé, il faudrait avoir des études épidémiologiques portant sur des familles mangeant bio régulièrement sur 5, 10 ou 15 ans, et on n'a pas ce genre d'études", commente Lylian Le Goff, expert de la fédération France nature environnement (FNE).
 

le site de l'AFP
http://www.afp.com


Qui veut: la peau du bio ?
http://www.lepoint.fr

Bio : une étude qui fait tache
 
C'est une étude scientifique que tous les agriculteurs bio voudraient voir réduite
en compost. Publiée la semaine dernière dans l'American journal of Clinical Nutrition par une équipe de chercheurs britanniques, elle dégomme l'idée que manger des produits estampillés bio est meilleur pour la santé. Pour arriver à cette conclusion, les scientifiques ont passé au tamis 52 471 articles écrits sur le sujet en un demi-siècle. Aucun avantage supplémentaire, que ce soit en apports de calcium de fer ou de vitamine C. Sauf que ladite étude pèche un peu. Déjà parce qu'elle ne prend pas en compte le les résidus de pesticides que l'on retrouve dans la moitié des fruits et légumes cultivé en intensif, ce qui change sensiblement la donne. Et puis, il y a cette-bizarrerie, pointée par la Fédération nationale de l'agriculture biologique (FNAB) et le Mouvement pour le droit et le respect des générations futures (MDRGF) : le rapport remis par les mêmes chercheurs à l'Agence britannique des normes alimentaires débouche sur des conclusions opposées à celles de l'étude publiée dans la revue scientifique. D'après ce pavé de 209 pages, les fruits, légumes et céréales bio contiennent plus de magnésium, de zinc et de composés phénoliques aux vertus antioxydantes que les cultures industrielles _ «D'un côté vous avez un rapport qui repose sur l'analyse de 162études, de l’autre une publication expurgée de 87d'entre elles, soit plus de la moitié, sur des motifs arbitraires», dénonce François Veillerette, le porte-parole du MDRGF.

La seule façon de clore le débat une bonne fois pour toute serait de lancer une grande étude épidémiologique comparant la santé des consommateurs qui n’achètent que des produits garantis sans pesticides à celle des autres. « C’est ce que nous réclamons en vain depuis des années » peste Dominique Marion, le président de la FNAB. En attendant, les agriculteurs sont de plus en plus nombreux à se convertir au bio. On en compte désormais 13 800, 15% de plus que l'année dernière.
 
Christophe LABBE et Olivia RECASSENS.
Le Point 6 aout 2009


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17 juillet 2009 5 17 /07 /juillet /2009 03:19



TIRPAA : DROITS DES PAYSANS OU MARCHE DE DUPES
 


L'Organe Directeur du Traité International sur les Ressources Phytogénétiques pour l'Alimentation et l'Agriculture a tenu sa troisième réunion du 1° au 5 juin 2009 à Tunis. Les paysans ont gagné de belles déclarations d'intention pendant que les firmes semencières ont consolidé leur accès gratuit à l'ensemble des semences paysannes de la planète et ont consolidé leur monopole sur les semences commerciales. Derrière des affrontements entre états du Sud et du Nord parfois assez vif, le « Traité sur les semences » offre-t-il de nouvelles opportunités aux paysans ?





I - Le TIRPAA, C'EST QUOI ?



I - a) Les semences paysannes, matière première de l'industrie




Les semences sélectionnées et conservées par les paysans du monde depuis l'émergence de l'agriculture et encore aujourd'hui constituent la seule et unique matière première de l'industrie semencière. C'est pourquoi elle les a baptisé « ressources phytogénétiques ». L'accès à ces semences est pour elle une question de survie, mais elles constituent par ailleurs son principal concurrent : tant que les paysans peuvent conserver et sélectionner leurs semences, il lui est difficile de leur vendre les siennes. Grâce aux techniques modernes d' « amélioration des plantes », l'industrie a stabilisé et homogénéisé ces semences paysannes pour les adapter aux augmentations de rendement permises par l'engrais chimiques et les pesticides, puis les a revendues aux paysans sous forme de variétés commerciales.



I - b) Le monopole des semences industrielles non librement reproductibles




Pour assurer ensuite son monopole commercial, elle a imposé dans la plupart des pays, pour tout échange ou vente de semences, la certification et/ou l'inscription au catalogue de variétés stables et homogènes. Les semences paysannes, reproduites au champ en pollinisation libre, évoluent et se diversifient constamment pour s'adapter à la diversité et à la variabilité des terroirs et des climats. Elles ne sont jamais homogènes ni stables, ce qui les prive de tout accès au marché et les condamne à disparaître. Mais l'interdiction d'échanger leurs semences n'empêche pas les agriculteurs d'utiliser une partie de leur récolte précédente comme semence. Pour supprimer cette dernière liberté, l'industrie a inventé les hybrides F1 qui rendent cette utilisation non productive. Puis, pour compléter ce verrouillage technique qui ne s'applique pas à toutes les espèces, elle a inventé deux formes de Droit de Propriété Intellectuelle (DPI) sur les variétés : le brevet qui interdit toute utilisation de semence de ferme et le Certificat d'Obtention Végétale (COV) qui en fait une contrefaçon que chaque état peut interdire ou n'autoriser qu'en échange du paiement de royalties.



I - c) Du patrimoine commun de l'humanité à la souveraineté nationale




Ce monopole a rapidement provoqué la disparition des semences paysannes dans les pays riches qui ont généralisé l'agriculture industrielle. Pour sauvegarder ses ressources, l'industrie a alors convaincu les états de les collecter avant qu'elles ne disparaissent et de les conserver dans des banques de gènes « hors situ ». Les paysans pratiquant une agriculture vivrière, dite « non commerciale », et ne disposant pas d'argent pour acheter les semences industrielles, ni l'engrais indispensable à leur culture, ont été autorisés à conserver leurs semences traditionnelles et à les échanger : cette conservation « in situ » permet le renouvellement de leur diversité qui n'est plus assuré dans les banques « ex situ ».



Les ressources phytogénétiques ont d'abord été considérées comme un « patrimoine commun de l'humanité », librement accessible pour les chercheurs et les sélectionneurs publics ou de l'industrie. Mais en 1992, lors de la Convention de Rio sur la Diversité Génétique (CDB), la protestation des états du Sud riches en biodiversité s'est enfin faite entendre dans les arènes de négociations internationales : ils ont pu dénoncer les pratiques de l'industrie du Nord qui d'un côté prélève gratuitement et librement leurs ressources génétiques, et de l'autre côté les transforme en produits protégés par des DPI, dont l'utilisation est interdite ou payante. L'industrie leur a alors proposé le marché suivant : nous reconnaissons votre souveraineté nationale sur vos ressources génétiques, nous nous engageons à négocier votre consentement avant tout prélèvement et à partager ensuite les bénéfices que nous retirons de leur exploitation commerciale. En contrepartie, vous devez reconnaître les DPI qui nous permettent de réaliser ces bénéfices et de les partager avec vous. Dès 1995, les accords sur les Aspects des Droits de Propriétés Intellectuels liés au Commerce (ADPIC) ont imposé à tous les pays membres de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) la reconnaissance soit du brevet, soit du COV, soit des deux cumulés, soit d'une autre forme efficace de protection intellectuelle des variétés végétales.



I - d) Le système multilatéral d'accès et les droits des agriculteurs



L'industrie a cependant pris la précaution d'exclure de l'obligation de partage des bénéfices toutes les ressources collectées avant la signature de la CDB et déjà enfermées dans ses propres collections ou dans les collections des pays du Nord auxquelles elle a librement accès puisqu'ils abritent ses usines. Il lui reste ainsi du temps pour négocier la suite. Sa première revendication est de retrouver l'accès libre à l'ensemble des ressources de la planète. Elle a pour cela proposé un système multilatéral d'accès qui est la première raison d'être du Traité : toute partie (état ou personne privée) qui met ses propres ressources à la disposition du système multilatéral a librement accès à l'ensemble des ressources qui y ont été cédées par les autres parties. Cet accès est libre pour la conservation, la recherche ou la formation, l'accès des agriculteurs restent soumis au bon vouloir des états. En contrepartie, les états signataires s'engagent à respecter les « droits des agriculteurs » qui ont conservé, conservent et conserveront ces ressources. Ces droits, qui restent la partie non mise en ouvre du Traité, sont ainsi définis :

- la protection des savoirs traditionnels,

- le partage des bénéfices issus de l'exploitation commerciale de leurs ressources,

- la participation aux décisions nationales concernant les ressources,

- conserver, utiliser, échanger et vendre leurs semences de ferme,

Mais l'application de ces droits reste sous la responsabilité des états, sous réserve de leurs lois nationales : la plupart des pays les ignorent totalement, certains tolèrent hors du cadre légal les échanges informels de semences entre agriculteurs, quelques rares pays les transcrivent partiellement dans leur législation nationale (Brésil, Inde, Pérou, Equateur, Suisse...)





I - e) Le partage des bénéfices et l'Accord de Transfert de Matériel


Le partage des bénéfices se négocie par contre au-delà des frontières et ne peut pas être bloqué par les seules législations nationales. L'industrie s'est d'abord employée à le rendre inapplicable. Pour qu'un particulier ou une communauté puissent le revendiquer, il faut que son le pays dispose d'une loi contre la biopiraterie : ces lois sont rares. Il faut ensuite que le cédant de la ressource soit informé de son exploitation commerciale par une tierce partie : aucun paysan et très peu d'états du Sud n'ont les moyens de surveiller l'ensemble des brevets déposés dans chaque pays. Quand au COV, il est déposé sans aucune indication de l'origine des ressources utilisées pour son obtention. C'est pourquoi de plus en plus de semencier y ont recours pour légaliser la biopiraterie : leur variété, issue des ressources phytogénétiques, est protégée par un COV qui permet d'échapper au partage des bénéfices. Les gènes présents dans la variété et liés l'invention technologique qui a permis son obtention sont brevetés, mais ne sont pas soumis au partage des avantages, au prétexte qu'ils sont issus de la recherche en biotechnologie et non des savoirs traditionnels associés à la ressource phytogénétique utilisée. Depuis la signature de la Convention de Rio en 1991 puis du TIRPAA 14 ans plus tard, on compte sur les doigts de la main les restitutions financières bilatérales d'un semencier à une communauté paysanne à laquelle il a emprunté des ressources phytogénétiques.



C'est pourquoi le Traité a mis au point un système multilatéral de partage des bénéfices lié aux échanges de ressources entre les parties : toute partie qui utilise une ressource issue du système multilatéral pour élaborer un produit protégé par un brevet doit reverser 1,1% de ses ventes à un Fond de partage des bénéfices géré par le Traité. Et pour permettre que cet engagement soit respecté, tout échange doit faire l'objet d'un enregistrement écrit communiqué au Traité sous forme d'Accord de Transfert de Matériel. Celui qui protège son produit avec un COV est par contre exonéré de cette obligation au prétexte que la ressource phytogénétique reste librement disponible pour la recherche et pour d'autres sélections. Les sommes récoltées par ce mécanisme sont destinées au renforcement des capacités des pays les plus pauvres à conserver leurs ressources « ex situ » et « in situ », ce qui laisse entendre qu'elles devraient rémunérer aussi les agriculteurs qui ont conservé ou conservent les ressources phytogénétiques.





II - LES ENJEUX DE LA REUNION DE TUNIS



Depuis la signature du Traité, les pays du Sud réclament une application effective du partage des bénéfices et des droits des agriculteurs. Un grand nombre d'entre eux, comme le Brésil, conditionnent l'accès à leur ressource à cette application. De leur côté, les pays riches, menés par le Canada, l'Australie, l'Allemagne et la France, conditionnent leurs contributions financières au fonctionnement du Traité et au partage des bénéfices à un accès libre de l'industrie à la totalité des ressources de la planète. Les intérêts des Etats-Unis qui n'ont pas ratifié le Traité, sont ouvertement défendus par la Canada qui s'exprime au nom de la « région Amérique du Nord ». Tant que l'UPOV et le brevet sur les gènes ou les technologies génétiques contourneront le partage des avantages et s'opposeront aux droits des agriculteurs de protéger leurs connaissances traditionnelles et de conserver, d'utiliser, d'échanger et de vendre leurs semences, le Traité ne pourra pas évoluer.





II - a) Le financement du fonctionnement du Traité



La mission du secrétariat du Traité est de faire appliquer l'ensemble du Traité, y compris ce qui concerne la conservation « in situ » et les droits des agriculteurs. Il devrait être financé par une contribution de chaque état proportionnellement à sa richesse. Mais l'industrie n'a aucun intérêt à ce que le secrétariat dispose de beaucoup d'argent pour travailler, elle a juste besoin qu'il continue à exister formellement pour couvrir l'existence du système multilatéral d'accès. C'est pourquoi de nombreux pays riches refusent de payer leur contribution.. Les discussions de la deuxième réunion du Comité Directeur à Rome en 2008 ont été entièrement bloquées par l'absence de financement du fonctionnement du secrétariat jusqu'à ce que l'Italie et l'Espagne s'engagent le dernier jour à verser la somme nécessaire pour le maintenir sous perfusion jusqu'à la réunion suivante : le reste de l'ordre du jour consacré entre autre aux droits des agriculteurs n'avait pas pu être abordé.



La réunion de Tunis s'est ouverte sur le même chantage. L'association de semenciers français Pro-maïs a annoncé dès l'inauguration qu'elle mettait sa collection prétendument privée dans le système multilatéral, en oubliant de signaler qu'elle est pour l'essentiel constituée de ressources publiques conservées par l'Institut National de Recherche Agronomique. Elle a rappelée l'inquiétude provoquée chez les sélectionneurs par les limitations à l'accès aux ressources génétiques résultant de la CDB, limitations que le Traité doit lever. La communauté indienne du Parc de la pomme de terre du Pérou qui a mis ses ressources à disposition du Traité a été largement félicitée. Le ton était donné, l'accès au ressources devait être le problème principal à résoudre, avant les questions de financement ou de droits des agriculteurs. L'engagement de l'Espagne à payer sa contribution, annoncé lui aussi dès l'ouverture, n'a en effet pas convaincu les pays riches récalcitrants à accepter le système de paiement contraignant réclamé par les pays du Sud. Pour eux, les problèmes de « non-application du Traité » doivent être réglés préalablement aux questions financières : sans le dire publiquement, cette exigence vise les pays qui, comme le Brésil, conditionnent l'accès à leurs ressources au règlement effectif du partage des bénéfices. La survie du Traité est donc restée dépendante des tractations sur les contributions volontaires, qui se sont conclues le dernier jour sur les seules miettes nécessaires au maintien de l'existence d'un secrétariat ne disposant d'aucun budget pour travailler.



Les pays riches aiment le multilatéralisme lorsqu'il s'agit de partager ce qui appartient aux pauvres, mais le refusent lorsqu'il s'agit de l'utilisation de leur argent. Ils préfèrent garder la maîtrise des sommes qu'ils engagent : ainsi la France, qui n'a jamais rien versé au Traité, déclare s'acquitter de sa contribution par des accords bilatéraux de coopération qu'elle négocie elle-même. Cela lui permet, au nom de l'aide au développement des capacités juridiques des pays pauvres, de leur imposer le modèle des lois semencières françaises qui nient les droits des paysans au profit des droits des obtenteurs. De même, les fondations Rockefeller ou Bill Gates sont les premiers donateurs du Fond fiduciaire mondial pour la diversité des cultures, fond indépendant du Traité qui finance les banques de gènes « ex situ » et a inauguré l'an dernier la banque de Svalbard en Norvège. Ces mêmes fondations industrielles se gardent bien de verser les mêmes sommes pour la conservation « in situ » et les droits des paysans.



II - b) Le financement du Fond de partage des bénéfices



Dès le premier jour de la réunion de Tunis, la FAO a publié un communiqué triomphal annonçant le démarrage du fonctionnement du mécanisme de partage des bénéfices. La veille, le Fond de partage des bénéfices avait décidé d'attribuer 250 000 dollars à une dizaine de projets destinés à « récompenser les paysans des pays pauvres pour avoir conservé et propagé des variétés de plantes susceptibles de sauvegarder la sécurité alimentaire mondiale au cours des prochaines décennies ». Qu'en est-il ? Tout d'abord, aucune organisation paysanne ne recevra la moindre somme : seules des institutions officielles et des Universités recevront ces fonds. Par ailleurs, malgré plus de 100 000 contrats d'échanges de ressources signés depuis deux ans, le Fond a récolté très peu d'argent du partage des bénéfices depuis son démarrage. Ce sont donc la Norvège, l'Italie, l'Espagne et la Suisse qui ont directement alimenté son capital pour « l'aider à démarrer ». Mais d'une part, les grosses multinationales semencières qui utilisent encore le brevet sur les variétés, seul type de DPI contraint à alimenter le Fond, sont pour la plupart domiciliées aux USA qui n'adhèrent pas au Traité. D'autre part, les COV accompagnés du brevet sur le gène ou la biotechnologie, se généralisent et ne versent rien au Fond.



Le mécanisme mis en place pour financer le Fond autorise donc ceux qui doivent payer à s'exonérer de toute obligation de paiement. L'aide au démarrage risque donc d'être sans lendemain si elle n'est pas constamment renouvelée. Ce constat dont personne n'est dupe a provoqué deux discussions :

- une réclamation des pays du Sud souhaitant un mécanise contraignant de financement du Fond par les états, catégoriquement refusée par les pays riches qui utilisent leurs éventuelles contributions volontaires comme un outil de pression dans les négociations pour l'accès aux ressources. Seule la Norvège, où l'agriculture est peu importante, prélève sur toutes les ventes de semences sur son territoire une taxe destinée à alimenter le Fond. Aucun pays n'a suivi cet exemple.

- un échange très « vif » sur les ATM. Alors qu'un groupe de travail officiel de l'Organe Directeur proposait à l'unanimité leur mise en place effective et contraignante, le Canada s'est violemment opposé à leur utilisation comme outil de traçabilité des échanges de ressources, au nom d'un prétendu refus des excès de bureaucratie. Personne n'a dit qu'une saine utilisation des ATM pourrait faciliter la lutte contre la biopiraterie, mais c'était le seul sujet en discussion ! Contrairement à l'Europe qui utilise le COV et n'est intervenue que mollement dans le débat, le Canada s'est exprimé au nom de la région Amérique du Nord et donc des USA dont certains industriels utilisent encore le brevet sur la variété.





II - c) L'utilisation durable et les droits des agriculteurs


Les articles 6 et 9 du Traité concernant l'utilisation durable et les droits des agriculteurs, qui n'avaient pas pu être abordés lors de la deuxième réunion du Traité bloquée par les discussions financières, étaient à l'ordre du jour de cette troisième réunion de Tunis. Le président a du dramatiser les discussions dès le deuxième jour dans une déclaration très solennelle destinée à renvoyer les tractations financières dans des groupes de contact se réunissant hors des sessions plénières, afin que l'ordre du jour puisse cette fois-ci être respecté.



Les débats sur l'utilisation durable des ressources phytogénétiques, concernant avant tout la conservation « in situ », dans les fermes, la sélection participative et la protection des systèmes agroécologiques qui développent la biodiversité cultivée, ont tourné court faute d'engagements suffisants concernant son financement. L'urgence des crises alimentaires et climatiques n'a pas suffit pour débloquer les sommes nécessaires pourtant dérisoires au regard des montagne de dollars et d'euros engloutis pour prolonger la survie du système financier mondial en faillite.



Les débats sur les droits des agriculteurs ont été beaucoup plus intéressants malgré l'absence de tout engagement financier pour contribuer à leur mise en application. Le Brésil a présenté avec le soutien de l'ensemble des pays du Sud un projet de déclaration qui a provoqué une très vive opposition du Canada. Ce dernier ne supportait pas l'article premier qui demandait aux pays membres d'évaluer, et si nécessaire de corriger, les mesures nationales susceptibles d'affecter la réalisation des droits des agriculteurs. Après de longues tractations, cet article s'est contenté « d'inviter chaque partie à envisager d'évaluer et de corriger si nécessaire » : tout aspect contraignant a disparu. De la même manière, le Canada a obtenu que la réalisation par le secrétariat du Traité d'ateliers régionaux (région = continent) sur l'application des droits des agriculteurs, impliquant la participation des organisations d'agriculteurs et des ONG concernées, soit conditionnée aux fonds disponibles. toujours dépendants de la bonne volonté des pays riches ! Mais il n'a pas pu empêcher l'engagement d'inscrire les droits des agriculteurs à l'ordre du jour de la prochaine session de l'Organe Directeur, sur la base des rapports venant des parties concernées, y compris des organisation paysannes.



II - d), L'UPOV et le brevet sur les gènes contre les droits des agriculteurs



Curieusement, l'Europe a approuvé la déclaration proposée par le Brésil dans sa première formulation beaucoup plus contraignante que celle qui a été finalement adoptée. On comprend mieux cette attitude quand on prend connaissance de la position de l'UPOV et de la contribution française aux débats : une fois de plus, c'est le COV qui fait la différence avec le brevet. L'UPOV estime respecter les droits des agriculteurs puisque, selon elle, ils ont le droit d'utiliser leurs semences de ferme et peuvent protéger leurs savoirs en déposant des COV. Elle oublie de dire que d'une part l'éventuelle utilisation des semences de ferme dépend du bon vouloir des états et est soumise au paiement de royalties, et que d'autre part le COV exige le respect des critères d'homogénéité et de stabilité antinomiques de la nature même des semences paysannes diversifiées et malléables. De plus, dans le cas des nouvelles variétés industrielles qui envahissent aujourd'hui la planète et dans lesquelles l'obtenteur a inclus des gènes brevetés ou des gènes marqueurs de sa biotechnologie brevetée, la liberté d'utilisation de la ressource nécessite d'en extraire les gènes en question, ce qu'aucun paysan ne peut faire. Seuls les laboratoires des multinationales peuvent faire cela. Cette liberté des paysans disparaît aussi en cas de contamination de leurs propres semences par des gènes brevetés.



Le cumul du COV sur la variété et du brevet sur le gène ou la biotechnologie annonce la confiscation définitive de toutes les semences de la planète par l'industrie. La possible ratification prochaine du Traité par la nouvelle administration Obama, annoncée par le Canada dès le premier jour de la réunion de Tunis, est le signe de l'abandon par l'industrie états-unienne du vieux brevet sur la variété et de son ralliement cette nouvelle sophistication de la biopiraterie. Les pressions directes des Etats-Unis, pour faire adopter par tous les pays le modèle législatif « UPOV + brevet sur le gène » dans le cadre des Accords de Libre Echange (ALE) qu'ils négocient, confirme cette lente mais certaine évolution.



Pour la France, le droit à la protection des connaissances traditionnelles est respecté par le COV qui ne protège que la variété nouvelle, comme si une variété pouvait être séparée des savoirs traditionnels ou des inventions brevetées associés à son obtention : elle n'a pas le cynisme de rajouter que cette variété nouvelle peut légalement être une variété existante dans les champs des paysans et non enregistrée puisque, contrairement au brevet qui ne protège que des inventions, le COV peut protéger aussi des découvertes. Elle oublie aussi d'indiquer que l'absence d'indication de l'origine des ressources génétiques utilisées pour obtenir une variété protégée par un COV légalise la biopiraterie qui est une violation flagrante de la protection des connaissances traditionnelles. La France indique aussi que les agriculteurs peuvent protéger leurs connaissances traditionnelles et utiliser leurs semences de ferme grâce aux catalogues des variétés « anciennes » ou « de conservation » qu'elle a mis en place : elle se garde bien d'indiquer que ces catalogues barrent eux aussi la route aux variétés paysannes en imposant les mêmes critères d'homogénéité et de stabilité que l'UPOV. Elle prétend ensuite respecter leur droit à participer à la prise de décision en les invitant à siéger dans des comités composés très majoritairement de sélectionneurs, d'obtenteurs et de multiplicateurs de semences industrielles. La France a enfin inventé le partage à sens unique : du champ et de la poche du paysan vers le portefeuille de l'obtenteur, mais jamais dans l'autre sens ! En effet, elle estime que le droit au partage des bénéfices est respecté dans la mesure où les agriculteurs bénéficient du progrès génétique amené par les nouvelles obtentions. Elle oublie que les obtenteurs n'ont rien partagé pour prélever les semences présentes dans les champs des paysans et qu'ils ont ainsi bénéficié gratuitement de l'essentiel du progrès génétique mondial qui résulte de milliers d'années de sélections paysannes, alors que les paysans doivent payer une première fois pour acheter les semences industrielles, et une deuxième fois lorsqu'ils souhaitent réutiliser leurs semences de ferme. Elle prétend aussi que la libre utilisation d'une variété protégée pour en sélectionner une autre assure le partage des bénéfices, alors que cette utilisation n'est libre que pour les variétés stables et homogènes des obtenteurs. Quand aux droits des agriculteurs d'échanger et de vendre leurs semences de ferme, la France n'en parle même pas : elle estime qu'en ne les reconnaissant que sous réserve des législation nationale, le Traité l'autorise à les ignorer, comme si une législation nationale pouvait interdire les libertés et les droits humains internationalement reconnus et non uniquement pour les encadrer.





III - QUELLES OPPORTUNITES POUR LES PAYSANS ?


La réunion de Tunis confirme que le Traité n'est toujours qu'un marché de dupe, mais qu'il peut devenir un levier puissant de la souveraineté alimentaire si les paysans et la société civile s'en emparent pour obtenir l'application intégrale des principes qu'il affiche.



Dès la première plénière, le Comité International de Planification pour la souveraineté alimentaire a déclaré que, en cas d'incapacité de l'Organe directeur du TIRPAA à satisfaire les droits collectifs des agriculteurs, les représentants des petits producteurs agricoles, des pastoralistes, des peuples indigènes, et des ONG qu'il regroupe, appelleront à la formation d'une coalition des états désireux de les faire appliquer immédiatement. La Via Campesina a ensuite déclaré que les semences non librement reproductibles de l'industrie sont la cause principale de la disparition de la biodiversité cultivée et une cause importante des crises alimentaires et ne peuvent donc en aucun cas en être le remède. Elle a demandé de les taxer pour financer les banques de semences locales gérées par la communauté et la sélection participative. Ces déclarations ont été soutenues par la quasi-totalité des délégations du Sud et, à la demande explicite de certaines d'entre elles, seront jointes au compte rendu officiel de l'Organe Directeur. De nombreux états du Nord sont aussi favorables à une amélioration de la reconnaissance des droits des agriculteurs, au moins dans les pays du Sud (chez les autres, mais pas chez eux !). La Norvège a ainsi exigé que les représentants des agriculteurs puissent s'exprimer et, avec la Suisse et l'Italie, elle a largement contribué à faire accepter la déclaration sur les droits des agriculteurs par les délégations les plus réticentes. Seuls le Canada, la France, l'Allemagne et l'Australie défendent pied à pied les intérêts des multinationales semencières. Pour aussi peu contraignant qu'elle soit, cette déclaration est devenue un document officiel validée à l'unanimité par l'Organe Directeur qui reconnaît ainsi explicitement que de nombreuses législations nationales constituent des obstacles à la réalisation des droits des agriculteurs : cette reconnaissance constitue un formidable levier pour permettre aux organisations paysannes et de la société civile d'interpeller leurs gouvernements et de les forcer à respecter leur signature du Traité.



La position défendue par l'UPOV montre que le Traité ne sera jamais appliqué tant que les droits des obtenteurs et des propriétaires de brevet sur le vivant ne seront pas redéfinis pour respecter les droits des agriculteurs. Le Traité est postérieur à l'UPOV, c'est donc à l'UPOV de se conformer au Traité et non l'inverse. Une campagne d'information mondiale doit dénoncer l'organisation de la biopiraterie par la fusion de l'UPOV et du brevet sur les gènes ou les biotechnologies, le marché de dupe du partage des bénéfices qui en découle, et l'attitude schizophrénique des gouvernements qui ont ratifié le Traité de la main droite alors que leur main gauche tenait encore le stylo qui a ratifié l'UPOV et l'APDIC.



Le secrétariat du Traité ne pourra organiser des ateliers régionaux sur les droits des agriculteurs que s'ils sont financés. Ils ne le seront pas sans une mobilisation importante, région par région, pays par pays, des organisations paysannes et de la société civile. La position défendue par la France montre que les débats seront vifs, mais que le cynisme des états semenciers ne tient pas dès lors qu'il est rendu visible. Et si le Traité s'avère incapable de poursuivre le travail sur les droits des agriculteurs, les coalitions des états et organisations de la société civile décidés à appliquer immédiatement les droits collectifs des agriculteurs, qui ont commencé à se dessiner à Tunis suite à l'appel du CIP, doivent se construire rapidement pays par pays, région par région puis au niveau mondial, de manière autonome ou sous l'autorité d'une autre organisation internationale que le Traité.



Les débats internationaux qui auront lieu à la FAO en novembre à Rome sur la crise alimentaire, puis à la CDB à Copenhague sur la crise climatique, les conférences régionales des collectifs pour la souveraineté alimentaire (2010 en Hongrie pour l'Europe). doivent permettre eux aussi de consolider ces coalitions. Les droits collectifs des paysans et des peuples indigènes sur les semences doivent figurer ou être imposés à l'ordre du jour de chacune de ces rencontres comme une contribution incontournable à la résolution des crises alimentaires, climatiques et à la souveraineté alimentaire.
 

Guy Kastler
délégué pour l'Europe de la commission biodiversité
de Via Campesina
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26 avril 2009 7 26 /04 /avril /2009 03:04


Guy Kastler : des plantes ayant subi des mutations sont déjà dans nos assiettes

OGM de deuxième génération, plantes mutées à coup de radiations, semences de synthèse dont les gènes seront numérisés et privatisés... Guy Kastler nous décrit ce que préparent les multinationales de l’industrie génétique et agroalimentaire. Le délégué général du Réseau semences paysannes explique également comment nous, jardiniers paysans ou simples citoyens urbains, pouvons empêcher cette destruction programmée du vivant. Entretien.

Via ContreInfo

















Guy Kastler, délégué général du Réseau semences paysannes, chargé de mission pour Nature et Progrès, membre de la Confédération paysanne et de la commission Biodiversité de Via Campesina, s’entretient avec Chloé Saint-Ville pour Basta, 11 mars 2009


Y a t-il aujourd’hui des plantes mutées dans nos assiettes ?

Oui, nous mangeons tous des blés mutés ou des potagères mutées. Contrairement aux plantes transgéniques, il n’y a aucune obligation d’information du consommateur. Les plantes mutées sont considérées comme des OGM par la directive européenne 2001-18, mais elles sont exclues de son champ d’application. Près de 3000 variétés de 170 espèces différentes obtenues à partir de mutations incitées sont recensées par l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique). Elles sont commercialisées sans aucun étiquetage et sans aucune évaluation environnementale ou sanitaire. Pourtant, de l’aveu même des chercheurs, le stress violent que subit la plante génère des recombinaisons génétiques aléatoires plus nombreuses qu’avec la transgénèse. Ces recombinaisons sont responsables de la plupart des effets nocifs des OGM sur la santé. Il n’y a aucune raison pour qu’elles soient inoffensives avec les plantes mutées.

Depuis quand l’Agence internationale de l’énergie atomique s’occupe-t-elle d’agriculture ?

Elle travaille depuis une dizaine d’années, en partenariat avec la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) sur l’augmentation de la production alimentaire des Etats membres. Ils justifient le recours à la mutagenèse par le besoin de trouver des plantes dès maintenant pour nourrir le monde.

En quoi consiste cette mutagenèse ?

Depuis les années 1950, les chercheurs travaillent sur des cellules qu’ils soumettent à un stress important : par irradiations - bombardements au cobalt ou rayons gamma - ou avec des produits chimiques très agressifs comme la colchicine. C’est ce stress qui provoque une mutation de gènes aussi appelée « mutation incitée » par l’AIEA [1]. Pendant des années, le coût de cette technique aléatoire a freiné son développement. Après avoir soumis des milliers de cellules au stress mutagène, il fallait les multiplier en autant de plantes avant de savoir si cette mutation présentait un intérêt. La connaissance aujourd’hui du génome de la plante rend la méthode de la mutagénèse intéressante économiquement et industrialisable. A partir du moment où l’on a la séquence génétique complète d’une plante, on repère immédiatement dans la cellule si un gène a muté ou pas et si la mutation est intéressante. Une dizaine de multiplications suffisent ensuite pour obtenir les lignées recherchées. La mutation incitée est considérée comme une « méthode de sélection traditionnelle », une tradition pourtant bien récente. On ne ferait qu’accélérer le processus naturel de modifications spontanées des plantes, au fil des millénaires et de leur co-évolution avec l’environnement [2].

La lutte contre les « simples » OGM est-elle déjà dépassée ? Où en est le rapport de force au niveau européen ?

La bagarre contre les OGM de première génération - OGM pesticides et/ou OGM résistants à un herbicide - n’est pas gagnée en Europe. Depuis 15 ans cependant, nous maintenons un rapport de force qui nous est favorable et qui est important pour les pays du Sud car il justifie leurs moratoires. Mais cela risque d’évoluer avec l’arrivée sur le marché des OGM de deuxième génération. Ces OGM sont dits « sécurisés » et « éco-compatibles » car ils sont censés garantir l’absence de risque pour l’environnement et la coexistence entre les cultures OGM et les autres cultures. Leur transgène deviendrait inactif avant la floraison ou la récolte, ou ne serait pas activé sans l’usage d’un produit chimique. Cela empêcherait toute contamination. Actuellement, ces OGM de deuxième génération font l’objet de recherches dans le cadre d’un programme appelé « Transcontainer » financé par la Commission européenne.

OGM de deuxième génération en préparation, plantes mutées déjà commercialisées... Que nous préparent encore les apprentis sorciers du 21ème siècle ?

Pendant longtemps, la biologie moléculaire a reposé sur l’idée qu’à un gène correspondait une protéine. Lorsque l’on modifiait un gène, on pensait ne modifier que la protéine. Ce dogme est totalement remis en cause aujourd’hui par la biologie synthétique. Aussi appelée biologie « systémique », elle porte sur la manière dont les gènes sont reliés entre eux. Les liens qui organisent les relations entre les gènes influeraient tout autant que les gènes eux-mêmes sur la présence et la nature des protéines. C’est ainsi que des chercheurs travaillent actuellement sur la combinaison de plusieurs gènes en vue de créer des plantes résistantes à la sécheresse. Mais ces recherches n’ont pas abouti pour le moment.

Dans la transgénèse, les gènes transférés sont déjà issus de synthèse chimique recopiant la séquence de gènes naturels. Aujourd’hui, une nouvelle étape est franchie. On passe de l’insertion de gènes synthétiques dans des organismes vivants réels - les OGM - à la mise en réseau de ces gènes et à la fabrication de portions de génomes ou de génomes totalement synthétiques. Autrement dit, il est possible de fabriquer aujourd’hui des organismes vivants et reproductibles complètement nouveaux. Des laboratoires ont réussi à le faire avec des bactéries. Leur travail porte aujourd’hui sur les plantes. C’est là que réside le principal danger : la plante entière étant fabriquée par synthèse, les chercheurs n’ont plus besoin de graines vivantes mais seulement de leur séquence génétique numérisée dans un ordinateur.

Les banques de semences, qui conservent la biodiversité des plantes cultivées, risquent-elles d’être abandonnées au profit de semences « numériques » privatisées ?

C’est déjà le cas, notamment dans les pays du Sud. C’est la mission des Etats de préserver les ressources génétiques - animaux, microbes, plantes - et de les mettre à disposition de tous. Cette mission est d’autant plus essentielle dans les pays qui ont industrialisé leur agriculture que la biodiversité cultivée dans les champs a disparu. Cette mission est pourtant délaissée progressivement au prétexte de manque de crédits. Une partie des banques de gènes est aujourd’hui privatisée, avec un accès de plus en plus restreint pour l’agriculteur ou le jardiner. Toutes les firmes ont construit leurs propres banques de gènes grâce à leur accès facilité aux banques de semences publiques.

En France, le Bureau des ressources génétiques (BRG) a été absorbé par une Fondation de droit privé (Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité) ouverte aux fondateurs publics - INRA [3], CNRS, Muséum national d’histoire naturelle, CIRAD... - mais également privés [4]. Ceux-ci siègent d’office au Conseil d’administration où ils deviendront facilement majoritaires.

Sur l’île de Svalbard en Norvège, les fondations Bill Gates et Rockefeller ont financé une banque de gènes dans laquelle sont entreposés dans le froid plus de 4,5 millions d’échantillons de semences. L’accès à cette banque est réservé aux institutions contrôlées par les multinationales semencières. Ces semences ne seront pas ressemées : elles perdront rapidement toute leur capacité de germination. Même mortes, elles pourront livrer leurs séquences génétiques aux ordinateurs de l’industrie, convaincue de sa capacité à recréer un monde artificiel à partir de ces seules séquences. Un monde qui sera totalement fiché par la marque des droits de propriété industrielle sur les gènes. Mais l’industrie ne pourra jamais faire des plantes capables de s’adapter partout. Elle en fabriquera quelques-unes pour toute la planète, qui ne pousseront qu’avec davantage d’engrais chimiques et de pesticides. En agissant ainsi, elle remet en cause la possibilité même de nos enfants de se nourrir.

Comment éviter cette destruction du vivant ?

Créé en 2003, le Réseau Semences Paysannes s’est développé très rapidement avec l’apparition des OGM. Paysans et jardiniers ont pris conscience que s’ils ne voulaient pas avoir d’OGM, ils devaient s’emparer du travail de conservation, de sélection et de multiplication des semences. La première étape a donc été de se réapproprier les savoirs et les ressources génétiques pour les remettre dans les champs. Tout en continuant ce travail de réappropriation, nous sommes en train de passer à une deuxième étape. Face au risque de disparition de milliers de graines enfermées dans des banques, face à l’impossibilité de sélectionner des plantes saines à partir de semences commerciales modernes trafiquées - à cause de la perte de leur qualité nutritionnelle et du besoin d’engrais chimiques pour pousser - nous appelons à vider les banques de semences pour faire des maisons de la semence.

A quoi servent ces maisons de la semence ? Quel rôle peuvent jouer les simples citoyens ?

L’idée des maisons de la semence est que paysans et jardiniers s’y regroupent pour mettre leurs semences en commun et gèrent ensemble ce patrimoine. On ne peut pas chacun de son côté replanter chaque année 500 à 800 variétés de semences. Dans la mesure où l’Etat privatise cette mission de service public, la société civile doit s’en emparer en faisant reposer la gestion de ce patrimoine sur une organisation collective. Les paysans ont un rôle clair à jouer dans ce travail de culture. Les jardiniers amateurs sont aussi une composante essentielle. Ils ont préservé ces dernières années des milliers de variétés anciennes de potagères ou d’arbres fruitiers qui seront une bonne partie de l’alimentation de demain. Pour celles et ceux qui n’ont pas de terre, nous avons besoin d’une aide administrative mais aussi de personnes qui communiquent sur ce travail et lui donnent du sens. La société civile doit aussi nous aider à mobiliser les élus pour la reconnaissance des droits des paysans et des jardiniers à conserver, ressemer et échanger leurs semences. Des conseils municipaux ont déjà pris des délibérations pour cela.

Les lois actuelles empêchent donc les paysans de ressemer leur propre récolte ?

Le verrouillage juridique est de pire en pire. En France, les agriculteurs n’ont pas le droit d’échanger des semences. Ils ne peuvent plus ressemer une partie de leur récolte sans payer de royalties, c’est à dire une redevance aux semenciers. On parle de « contribution volontaire obligatoire » pour le blé tendre. C’est un système qui pourrait être étendu à toutes les espèces. On a encore le droit aujourd’hui d’échanger des semences qui ne sont pas inscrites au catalogue à titre payant ou gratuit si c’est pour une exploitation non commerciale. On peut par exemple vendre une semence à un jardinier amateur car il va consommer sa propre récolte et ne pas la vendre sur un marché. Mais cette dernière marge de manœuvre risque aussi de disparaître avec une réforme actuelle des règlements européens. Pourtant, le Parlement a ratifié un traité, le TIRPAA [5], qui reconnaît les droits des paysans à ressemer, échanger et vendre leurs semences. Mais le gouvernement n’applique pas ce traité et une campagne citoyenne est aujourd’hui indispensable pour la reconnaissance de ces droits.

Ces alternatives ont-elles des équivalents en Europe ?

Des réseaux ressemblent beaucoup aux nôtres en Italie, en Espagne, en Allemagne ou en Autriche. La mobilisation citoyenne en Europe sur le thème des semences prend de l’ampleur et accompagne très souvent les luttes anti-OGM. Nous avons du retard sur les pays du Sud où la conservation de la biodiversité est le premier acte de l’agriculture vivrière. Tous ces paysans conservent et échangent leurs semences. Leur mobilisation aujourd’hui est extrêmement importante à la fois contre les lois européennes qui s’imposent à l’ensemble de la planète, et contre les Ogm pour protéger leurs semences des contaminations. Nous avons beaucoup à apprendre des pays du Sud.


[1] « Les scientifiques de l’AIEA utilisent les rayonnements pour produire des plantes améliorées à rendement élevé qui soient capables de s’adapter à des conditions climatiques difficiles comme la sécheresse ou les inondations, ou de résister à certaines maladies et insectes ravageurs. L’induction de mutations, c’est le nom de la technique, est sûre, éprouvée et rentable. Elle est utilisée depuis les années 20 », communiqué de l’AIEA du 2 décembre 2008, « La science nucléaire au service de la sécurité alimentaire ».

[2] « Je comprends que les gens se méfient de ces technologies mais, pour ce qui nous concerne, il faut bien comprendre que, dans la sélection des plantes, nous ne produisons rien qui ne soit produit par la nature elle-même. Aucun rayonnement résiduel ne subsiste dans une plante après l’induction de mutation », Pierre Lagoda Division mixte FAO/AIEA.

[3] Institut public de recherche agronomique

[4] France génétique élevage pour les éleveurs, Limagrain ou Oleosem pour les semenciers, L’Oréal ou LVMH pour les cosmétiques, Total pour l’énergie ou encore le Medef, pour n’en citer que quelques-uns, font partie du Conseil d’orientation stratégique de la fondation aux côtés de structures publiques ou d’associations de défense de l’environnement.

[5] Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture

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21 mars 2009 6 21 /03 /mars /2009 03:42
Qui profite des OGM : engraisser les géants des biotechnologie ou nourrir les pauvres


Un nouveau rapport des Amis de la Terre International révèle que les plantes modifiées génétiquement sont à l’échelle mondiale, un échec et que les statistiques qui montrent une croissance des OGM en Europe sont basées sur des chiffres manipulés. (1)

Le dernier rapport « A qui profite les plantes GM ? » (2) démonte les incohérences du lobby européen EuropaBio, dans ses calculs de la surface totale des surfaces cultivées en OGM. (3) Ce groupe de pression a gonflé les chiffres de 21 % en 2008 pour dissimuler une baisse réelle sur le terrain.

En utilisant ces chiffres trompeurs, les industriels essayent de donner l’impression que les plantes GM sont plus répandues que ce n’est réellement le cas. En réalité l’opposition des citoyens et leur constante pression sur les gouvernements pour maintenir des conditions de sécurité décentes, font que la surface plantée en OGM en Europe a diminué continuellement depuis 2005, avec une baisse totale de 35 %. (4)


Pour Helen Holder, coordinatrice de la campagne OGM des Amis de la Terre-Europe : « Si les OGM étaient acceptés, cela signifierait de gros profits pour une industrie qui profite de ses droits sur les semences brevetées et les pesticides, mais les Européens, depuis 10 ans, refusent de voir des OGM dans leurs champs et dans leurs assiettes. L’industrie des biotechnologies essaye encore une fois d’imposer de force les OGM et, pour y parvenir, n’hésite pas à recourir aux mensonges. Il est temps que les industriels arrêtent leur boniment et reconnaissent l’échec des OGM en Europe. »


Pour Christian Berdot, coordinateur de la Campagne OGM des Amis de la Terre-France : « Les plantes GM ne sont en fait cultivées que sur de petites surfaces de par le monde. Ce n’est que dans une poignée de pays qu’elles couvrent une surface importante avec comme destinations, les marchés des pays plus riches. Il est maintenant reconnu internationalement que les plantes GM n’apportent rien aux petits paysans et qu’elles ne contribuent pas du tout à la lutte contre la pauvreté, au contraire. »


Dans l’agriculture européenne, la culture des OGM, avec le maïs, seule plante GM autorisée, reste presque anecdotique et ne couvre qu’un ridicule 0,21 % de la surface agricole de l’Union Européenne. (5) Sur le plan mondial, les OGM restent toujours confinés à une poignée de pays avec des secteurs agricoles très industrialisés et orientés vers l’exportation. Près de 90 % de la surface plantée en OGM en 2007 se trouvaient dans 6 pays d’Amérique du Nord et du Sud, avec un total de 80 % pour les seuls Etats-Unis, Brésil et Argentine. Un pays, les _Etats-Unis, représente à lui seul, plus de 50 % des OGM dans le monde. En Inde et en Chine, 3 % ou moins des terres arables sont plantés en OGM. (6)


Le rapport des Amis de la Terre démontre combien les populations de par le monde sont frappées par la hausse des prix des aliments de base, alors que les multinationales des biotechnologies annoncent des profits record dus à l’augmentation exponentielle du prix des semences et des pesticides. Les agriculteurs sont pressés comme des citrons alors que parallèlement, le nombre d’humains souffrant de la faim dans le monde atteint le milliard. (7)


Bien que les industriels aient raconté beaucoup de contre-vérités durant la crise alimentaire, pas une seule plante GM commercialisée jusqu’à ce jour n’a de meilleurs rendements, n’est tolérante à la sécheresse ou au sel, ou encore n’a une meilleure composition nutritionnelle ou tout autre caractère « bénéfique » que ces firmes nous promettent depuis si longtemps. (8)


Les données officielles des principaux pays producteurs – Etats-Unis, Argentine, Brésil – confirment une augmentation des volumes de pesticides utilisés avec les plantes GM, y compris de produits chimiques toxiques interdits dans certains pays européens. Cela entraîne une augmentation massive des coûts pour les agriculteurs ainsi que des problèmes agronomiques, sanitaires et environnementaux, affectant en particulier les communautés pauvres vivant à proximité des exploitations cultivant les OGM. (9)


Notes :
(1)La Fédération Internationale des Amis de la Terre (FoEI) publie son rapport un jour avant la sortie du rapport de l’ISAAA.(International Service for the Acquisition of Agri-biotech Application). Cet organisme sponsorisé par les industries des biotechnologies publie chaque année un rapport sur “L’état mondial des Biotechnologies commercialisées”. L’ISAAA fait la promotion des OGM comme étant la solution de la faim et la pauvreté dams le monde.
(2) Rapport complet (en anglais) :« Qui profite des OGM », « Who benefits from GM crops : engraisser les géants des biotechnologie ou nourrir les pauvres »
- Résumé (en anglais) ici
- Exposé "OGM en Europe" (en anglais) ici
(3) http://www.europabio.org/documents/2008%20Cultivation%20chart.pdfLe groupe de pression pro-biotechnologie, EuropaBio a “oublié” de compter dans ses calculs la France – qui a interdit la culture des OGM en 2008 – et arrive ainsi à une augmentation globale de la surface cultivée alors qu’avec l’interdiction française, il y a dans les faits une diminution des surfaces.
(4) Des plantes GM ont été cultivées dans plusieurs pays européens : République Tchèque, la France qui a arrêté la culture en 2008, l’Allemagne, le Portugal, la slovaquie, l’Espagne et la Roumanie. (Voir Exposé Europe (en anglais) :
(5) ISAAA 2008comme l’a rapporté GM freeze
(6) « Qui profite des OGM », « Who benefits from GM crops : engraisser les géants des biotechnologies ou nourrir les pauvres ». Voir note (2)
(7) Monsanto est la plus grande firme mondiale de semences et détient un quasi monopole sur le marché des semences GM. Elle commercialise aussi le RoundUp, l’herbicide le plus vendu dans le monde, qui est utilisé en association avec les semences RoundUp Ready. Goldman Sachs prévoyait une augmentation totale des revenus de Monsanto de 74 % de 2007 à 2010 ( de 8,6 à 14,6 milliards de dollars). Le prix moyen des semences de soja, la plante la plus grande cultivée aux Etats-Unis, a augmenté de plus de 50 % en seulement deux ans de 2006 à 2008, passant de 32,30 à 49,23 par acre. On annonce régulièrement que le prix du maïs trois-traits (triple stacks) de Monsanto va augmenter de 65/100 dollars par sac à plus de 300 dollars en 2009. Le prix au détail du RoudUp est passé de 32 dollars le gallon en décembre 2006 à 45 dollars un an plus tard, pour atteindre 75 dollars en juin 2008 – soit une augmentation de 134% en moins de deux ans. Monsanto contrôle en gros 60 % du marché du glyphosate (l’agent actif du RoundUp).
(8)L’industrie des biotechnologies n’a jusqu’à maintenant pas commercialisé une seule plante qui ait amélioré l’alimentation, ait un meilleur rendement, une tolérance à la sécheresse ou toute autre caractère bénéfique promis. Comme les années précédentes, l’agriculture GM se compose de 4 plantes avec deux traits génétiques, tolérance aux herbicides et/ou plantes insecticides. Sur les 12 plantes GM qui attendent l’autorisation du ministère états-unien de l’Agriculture de mise sur le marché, 5 soit près de la moitié sont tolérantes à un herbicide. Deux (soja et maïs) ont une double tolérance à des herbicides, tandis que les trois autres sont tolérantes à un seul herbicide (coton, luzerne et herbe de golf). Les autres ne présentent aucun trait nouveau. Trois variétés de maïs insecticide et une de coton ne sont que des variations mineures des plantes insecticides déjà existantes. La papaye résistante à un virus et le soja au contenu en huile modifié sont déjà autorisés sans toutefois être cultivés sur des surfaces importantes. Les œillets manipulés pour obtenir une modification de la couleur sont une application insignifiante des biotechnologies. Pour finir, le maïs modifié génétiquement pour contenir un enzyme facilitant la transformation en éthanol présente des risques potentiels pour la santé humaine et est un développement totalement inutile, vu l’énorme tonnage de maïs existant déjà consacré à la production d’éthanol.
(9) « Qui profite des OGM », « Who benefits from GM crops : engraisser les géants des biotechnologie ou nourrir les pauvres ». Voir note (2)

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11 mars 2009 3 11 /03 /mars /2009 03:35


OGM : des scientifiques US, spécialistes du maïs, l’affirment "L’industrie fait obstacle à la recherche !"


Par Christian Berdot

sur Les Amis de la Terre

Dans une réclamation inhabituelle, un groupe de scientifiques universitaires [1] affirment que les compagnies de biotechnologies les empêchent de pouvoir mener des recherches complètes sur l’efficacité et les impacts des plantes modifiées génétiquement, commercialisées par l’industrie. (Article d’Andrew Pollack, paru le 19 Février 2009, dans le New York Times - Traduction : Christian Berdot, Amis de la Terre)

Dans une déclaration présentée au Ministère de la Protection de l’Environnement (EPA), les scientifiques écrivent que « aucune recherche vraiment indépendante ne peut être légalement menée sur de nombreuses questions critiques ». L’EPA recherche des commentaires scientifiques provenant de la recherche publique pour des conférences sur les plantes biotechnologiques, qui doivent se tenir la semaine prochaine.


Cette déclaration viendra certainement soutenir les groupes critiques vis-à-vis des plantes génétiquement modifiées, comme les groupes écologistes, qui se plaignent depuis longtemps déjà, que les plantes n’ont pas été étudiées de façon complète et suffisante et pourraient avoir des effets inattendus sur la santé et l’environnement.


Les chercheurs, 26 scientifiques spécialisés dans l’étude des insectes du maïs, ont retiré leur nom car ils craignaient que les compagnies ne les excluent de leurs recherches. Cependant, plusieurs d’entre acceptèrent, lors d’interviews, que leur nom soit cité.


Pour les scientifiques, il est problématique que les agriculteurs et les autres acheteurs de semences génétiquement modifiées aient à signer un accord visant à garantir que, lors de la culture, les droits des compagnies sur les brevets ainsi que les règlements environnementaux sont bien respectés. Cet accord interdit aussi l’utilisation des plantes à des fins de recherches.


Ainsi, alors que des chercheurs universitaires peuvent acheter librement des pesticides ou des semences conventionnelles pour leurs recherches, ils ne peuvent le faire avec des semences modifiées génétiquement. Il leur faut obtenir la permission des compagnies semencières. Et parfois, la permission leur est refusée ou bien les compagnies insistent pour examiner toutes les conclusions avant qu’elles ne puissent être publiées.


Pour les scientifiques, ces accords sont depuis longtemps un problème, mais ils le font savoir publiquement car la frustration s’est accumulée.

Pour Ken Ostlie, entomologiste à l’Université du Minnesota et lui-même signataire de la déclaration, « Si une compagnie peut contrôler les recherches qui paraissent dans le domaine public, elle peut réduire les aspects négatifs potentiels qui peuvent survenir dans toute étude ».


Il est frappant de constater que les scientifiques qui ont exprimé cette protestation - et qui proviennent en grande partie d’universités financées par les états avec de grands programmes agricoles - affirment ne pas être opposés à la technologie. Au contraire, pour eux, en étranglant la recherche, l’industrie les empêche de fournir aux agriculteurs des informations sur les meilleurs moyens de faire pousser les plantes. De plus, ajoutent-ils, les données fournies aux organismes de contrôle gouvernementaux sont « excessivement restreintes ».


Pour Elson J. Shields, professeur d’entomologie à l’Université de Cornell, les firmes « peuvent potentiellement pratiquer le blanchissage des données et des informations soumises au Ministère de la Protection de l’Environnement (EPA) ».

William S. Niebur, le vice-président en charge de la recherche sur les cultures pour DuPont - qui possède la grande compagnie semencière Pioneer Hi-Bred - défend la politique de sa firme. Pour lui, étant donné que les plantes génétiquement modifiées sont soumises à la réglementation du gouvernement, les compagnies doivent contrôler avec soin la façon dont elles sont cultivées. « Nous devons protéger nos relations avec les agences gouvernementales en ayant des mesures de contrôle très strictes de cette technologie ». Mais il rajoutait qu’il serait heureux de pouvoir parler de leurs problèmes avec les scientifiques.


Monsanto et Syngenta, deux autres firmes de semences GM, déclarèrent jeudi, qu’elles soutenaient la recherche universitaire. Mais elles affirmèrent comme Pioneer, que leurs contrats avec les acheteurs de semences avaient pour but de protéger leur droit de propriété intellectuelle et de respecter les obligations réglementaires. Pourtant, Dale Emery, porte parole du ministère de la Protection de l’Environnement, déclarait jeudi que le gouvernement n’exigeait que la gestion de la résistance aux insectes de la plante et que toute autre restriction contractuelle était mise en place par les compagnies. L’accord de Syngenta avec le cultivateur interdit non seulement la recherche en général, mais spécifie qu’un acheteur de semences ne peut comparer le produit de Syngenta avec aucune autre semence rivale.


Le Dr Ostlie de l’Université du Minnesota avait en 2007, la permission de trois compagnies pour comparer dans quelles mesures leurs variétés de maïs insecticides se comportaient bien contre le vers de la racine du maïs, dans cet état. Pourtant, en 2008 Syngenta retira sa permission et l’étude dut être arrêtée. Pour le Dr Ostlie « La compagnie a juste décidé qu’il n’était pas dans son intérêt de la laisser se poursuivre ».


Mark A. Boetel, professeur associé d’entomologie à l’université d’état du Dakota raconte qu’avant que les semences de betteraves sucrières GM soient vendues pour la première fois aux agriculteurs l’an dernier, il souhaitait tester comment la plante réagirait à un traitement insecticide. L’université n’a pas pu obtenir un accord sur la publication et les droits de propriété intellectuelle, avec les deux compagnies responsables, Monsanto et Syngenta.


De son côté, Chris DiFonzo, une entomologiste de l’Université d’état du Michigan évitait, lorsqu’elle menait des études sur les insectes, les champs avec des plantes transgéniques car sa présence mettrait l’agriculteur en situation de violation de l’accord du cultivateur.


Un panel scientifique consultatif de l’EPA prévoit de tenir deux réunions la semaine prochaine. Une réunion se penchera sur la demande de Pioneer Hi-Bred concernant une nouvelle méthode qui réduirait la part du champ d’un agriculteur devant être réservée comme refuge destiné à prévenir l’apparition de résistance chez les insectes à son maïs insecticide. La deuxième réunion abordera d’une façon plus générale les cultures GM insecticides.


Christian Krupke, professeur assistant à l’Université de Purdue, a déclaré qu’étant donné que des scientifiques externes n’ont pu étudier la stratégie de Pioneer, « il ne pense pas que les inconvénients potentiels ont été évalués de façon critique par autant de personnes que cela aurait été nécessaire ». Le Dr Krupke est le président du comité qui rédigea la déclaration, mais il n’a pas voulu dire s’il l’avait signée.


Le Dr Niebur de Pioneer, répondit en affirmant que sa compagnie avait collaboré lors de la préparation de ses données avec les Universités de l’Illinois de l’Iowa et du Nebraska, les états les plus touchés par ce ravageur particulier.


Pour le Dr Shields de l’université de Cornell, le financement de la recherche agricole est passé graduellement du secteur public, au secteur privé. De nombreux scientifiques universitaires sont devenus dépendants, du financement ou de la coopération technique, de la part des grandes compagnies semencières. Il explique : « Les gens ont peur d’être mis sur des listes noires. Si votre seule tâche est de travailler sur des insectes du maïs, que vous avez besoin des dernières variétés de maïs et que les compagnies décident de ne pas vous les donner, vous ne pouvez pas travailler ».


Article original voir ICI



[1] Numéro de référence du commentaire : 8084de39

La déclaration suivante a été déposée par 26 scientifiques de premier plan, spécialistes des insectes du maïs et qui travaillent dans des instituts de recherches publics, situés dans 16 états producteurs de maïs. Tous ces scientifiques ont participé activement dans les Projets Régionaux de Recherches NCCC-46 « Développement, Optimisation et mise au point de stratégies de gestion du vers de la racine du maïs et d’autres insectes souterrains, ravageurs du maïs » et/ou d’autres projets liés aux ravageurs du maïs. La déclaration peut s’appliquer à toutes les décisions du Ministère de la Protection de l’Environnement sur les PIP, (Protection Incorporées dans les Plantes) et pas seulement à ce panel scientifique consultatif.

Déclaration :

« Les accords de technologie / gestion exigés pour l’achat de semences modifiées génétiquement interdisent explicitement la recherche. Ces accords empêchent les scientifiques publics de poursuivre le rôle qui leur est imparti au nom du bien public, à moins que l’industrie n’approuve la recherche. Il résulte de cet accès limité qu’aucune recherche vraiment indépendante ne peut être légalement menée sur de nombreuses questions critiques concernant la technologie, ses performances, ses implications pour la gestion (des cultures), la gestion des résistances aux insectes et ses interactions avec la biologie des insectes. Il en résulte que les données en provenance du secteur public parvenant à un panel scientifique consultatif de l’EPA, sont excessivement restreintes. »

Pour voir l’original en anglais : Public Submission : EPA-HQ-OPP-2008-0836-0043

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11 août 2008 1 11 /08 /août /2008 03:17
Le Mexique sous la pression de Monsanto, le centre historique du maїs menacé de contamination génétique.

Le Mexique, le centre historique de la culture du maїs depuis plus de 8000 ans, est sous la pression de Monsanto et des grands semenciers qui cherchent à introduire par tous les moyens leurs plantes génétiquement modifiées, au risque de contaminer une réserve unique de biodiversité et de bouleverser l’organisation rurale et sociale du pays. Mais la résistance s’organise grâce à la campagne « « Sin maíz no hay país ».

La souveraineté alimentaire.

Le débat sur la crise alimentaire a permis de relancer certains concepts géopolitiques qui viennent contrarier les plans des firmes internationales et mettent les paysans de nouveaux au centre de la problématique de l’alimentation mondiale.

Des chercheurs, comme Kathleen Mc Afee, professeur de relations internationales à l’Université d’Etat de San Francisco, viennent appuyer les petits paysans du Sud pour demander aux Etats-Unis l’arrêt de l’exportation massive de maїs subventionné car cela entraîne une chute des cours dans les pays pauvres et provoque un exode rural sapant les fondations des communautés agricoles.

Dans quatre études de Mc Afee réalisées pour le North American Free Trade Agreement (NAFTA), la chercheuse démontre comment la nation berceau du maїs est devenue, en quelques années, le second importateur de maїs américain, et comment cela a accéléré l’exode rural des fermiers, pour plus de la moitié des Indiens, qui terminent sur les routes de l’immigration ou des bidonvilles de Mexico. Elle prend aussi le temps de la réflexion pour examiner l’impact socioculturel de la contamination par les semences transgéniques américaines des milliers de variétés de maїs « criollo » (local), de toutes les couleurs et adaptées à tous les microclimats du Mexique.

Aujourd’hui des paysans du Mexique s’appropient ces concepts, certains ne possédant parfois qu’une poignée d’hectares, revendiquent leur territoire et leur culture, ils se disent les mieux placés pour soutenir leur famille et leur communauté, mais pas avec des exportations à bas prix ou des plantes transgéniques, mais simplement en poursuivant leur travail de sélection des meilleures plantes et en encourageant leur gouvernement à investir dans les infrastructures rurales. Ils appellent cela la « souveraineté alimentaire ».

Cette opposition franche des mexicains s’explique non seulement pour une question de protection de la biodiversité de la flore mexicaine, mais s’inscrit aussi dans une logique culturelle de protection de l’alimentation des populations mexicaines dont le maїs est l’aliment principal. L’introduction du maїs transgénique est donc aussi largement vue là-bas comme une main mise des firmes biotech sur l’ « aliment roi » de l’ancien royaume maya, il n’est donc pas surprenant de voir les leaders paysans maniés si aisément des concepts diplomatiques comme la « souveraineté alimentaire », ou pour ainsi le droit des peuples à disposer librement de leur nourriture, car le débat tourne à la défense nationale contre l’invasion OGM. 

La pression commerciale américaine fait monter la tension dans les campagnes mexicaines.

En 1998, le gouvernement mexicain avait banni la culture de maїs génétiquement modifié, puis a officiellement reconduit le moratoire en 2004 en introduisant des clauses sur les essais expérimentaux – mais aucun permis de test n’a jamais été délivré. Cependant, ce printemps, certains fermiers ont ouvertement déclaré avoir acheté des semences transgéniques aux Etats-Unis et les avoir illégalement planté dans l’Etat de Chihuahua dans le Nord du pays.

En Octobre dernier, Armando Villareal, un leader paysan de Chihuahua, a été abattu à la sortie d’une réunion d’agriculteurs à Nuevo Casas Grandes. Villareal dénonçait depuis un temps les plantations illégales de maїs transgéniques dans les municipalités à majorité Mennonite de Cuauhtemoc et de Naniquipa.

Les communautés Mennonite de Chihuahua sont venues du Canada dans les années 20, après une dispute contre l’Etat Canadien sur l’éducation, et l’Etat mexicain, sous la présidence de Alvaro Obregon, les a accueilli en leur offrant des terres. Aujourd’hui les Mennonites cultivent avec succès plus de 60 000 hectares dans le nord-est du pays mais ils ne sont pas intégrés à la population mexicaine et des questions d’irrigations, dans une région semi désertique, continuent de nourrir des tensions entre les deux communautés.

Ironiquement, Villareal ne s’opposait pas à la culture de maїs génétiquement modifié au Chihuahua mais il dénonçait les importations illégales de semences transgéniques depuis l’Etat du Kansas. Neuf mois après son assassinat, l’affaire n’a toujours pas été résolue et ses meurtriers courent toujours dans la nature.

Monsanto et les firmes biotech poussent pour l’introduction du maїs GM au Nord du Mexique.

Monsanto a refusé de commenter l’exportation et l’introduction illégale de son maїs Bt et Roundup Ready sur les terres de Chihuahua, cependant ce fait est loin d’être anecdotique puisque dans de nombreux pays l’introduction des OGM s’est faite de manière clandestine comme au Brésil ou au Paraguay. La répétition des mêmes méthodes d’introduction illégale des OGM, contre la volonté souveraine des Etats et des peuples, semble relever beaucoup plus d’une stratégie commerciale agressive que d’une simple coïncidence. Ces entreprises multinationales méprisent les représentants publics et les citoyens des Etats, ils ne s’attardent pas sur des notions comme la liberté ou le libre choix de son alimentation, pas plus qu’ils ne s’intéressent aux questions de santé publique. Leurs méthodes sont simples, lorsque les représentants de l’Etat ne peuvent être convaincus par aucun moyen, ils contournent l’Etat via des intermédiaires locaux et passent dans la clandestinité au mépris de tous les règlements internationaux.

Une de leur méthode favorite consiste aussi à établir une association vitrine, une sorte de cheval de Troie local, qui leur servira de devanture pour la plupart de leur mission de propagande mais aussi de fusible juridique pour les manœuvres les plus douteuses. Au Mexique cette association s’appelle Agrobio, une association mexicaine fondée par Monsanto, Bayer et Dow Chemicals, dont le Président est un certain José Luis Solleiro, un chercheur de l’Université National de Mexico. D’après M. Solleiro « les critiques contre le maїs transgénique maintiennent le Mexique à la traîne. » Il ajoute que le Gouvernement est en train de considérer la possibilité d’autoriser la culture du maїs GM dans le Nord du Mexique, où selon lui « il n’y a pas de maїs natif et peu d’opposition à la nouvelle technologie transgénique » (ou alors peu de candidat au martyr…). Solleiro n’est d’ailleurs pas embarrassé lorsqu’il s’agit de commenter les cultures illégales des Mennonites dans le Nord du Mexique « cela fait déjà quatre ans et rien n’est arrivé » puis il ajoute « je pense que nous méritons de pouvoir faire des expériences sérieuses sur les effets du maїs transgénique. »

Bien entendu l’autorisation d’expérimentation en champs ouverts constitue l’une des dernières étapes avant le lancement à grande échelle de la nouvelle plante génétiquement modifiée. Ces essais permettent de rechercher une meilleure adaptation de la plante à son environnement local, c’est-à-dire que les firmes avant de lancer une nouvelle semence prennent toujours soin de croiser des variétés locales avec leur plante GM afin d’obtenir une plante résistante aux conditions climatiques du pays ciblé, par exemple le Coton Bt de Monsanto des Etats-Unis n’est pas le même que celui cultivé au Burkina Faso ou en Inde. Malheureusement ces essais en plein champ, ainsi que l’adaptation de la cassette génétique sur des plantes locales, sont souvent les premiers déclencheurs de la contamination des plantes natives.

Les réserves de maїs natifs déjà contaminées par les OGM.

En 2001 déjà, deux chercheurs de l’Université de Berkeley en Californie, avaient rapporté que de l’ADN modifié, probablement venant de maїs GM étasunien, avait été découvert dans le génome de variétés locales dans les montagnes de Oaxaca, le berceau mondial du maїs.

En 2004, en pleine controverse sur la contamination des réserves mexicaines, la Commission pour la Coopération Environnementale de la NAFTA enfonce le clou en publiant un rapport recommandant de suspendre l’exportation vers Mexique de graines de maїs américain et de limiter le commerce à la farine de maїs garantissant l’impossibilité de contamination. Malheureusement les Etats-Unis ont protesté et le Gouvernement Mexicain n’a jamais pris de mesure dans ce sens.

Dans un rapport publié en 2007 par Mc Afee, la chercheuse demande aux autorités d’élargir le débat sur les risques de l’introduction des OGM au delà de ce qu’elle appelle « le champ de la techno-science ». Selon elle, les experts devraient élargir l’étude à l’impact des OGM sur toutes les variétés de maїs local mais aussi sur l’écologie, les croyances, le style de vie des paysans et leurs habitudes alimentaires car beaucoup d’entre eux continuent de cultiver la terre à la manière de leurs ancêtres en préservant les espèces locales génération après génération.

D’après Daniela Soleri, une ethno-écologue de l’Université de Californie à Santa Barbara qui étudie la culture, au sens large, du maїs au Mexique, « il y a eu un échec à maintenir des critères scientifiques impartiaux des deux cotés » et elle ajoute que le système américain, dans son interprétation de la situation, exclue des variantes tels que les fermiers et leur savoir traditionnel, ce qui fausse les résultats et provoque les crispations décrites.

Campagne Sin maíz no hay país, une résistance aux OGM bien organisée.

La résistance s’organise rapidement au Mexique pour défendre la souveraineté alimentaire du pays ainsi que sa biodiversité unique, le 25 Juin 2007 était lancée publiquement la campagne nationale : « Sin maíz no hay país, sin fríjol tampoco, pon a México en tu boca. » ( Sans maїs ni haricot, il n’y a pas de Mexico). Cette opération regroupe quelques 300 organisations de la société civile du monde rural et indigène (Via Campesina), écologiste (Greenpeace), des Droit de l’Homme, ou encore de défense des consommateurs… Cette initiative vise à sortir le maїs et les haricots des Accords commerciaux de l’ALENA mais aussi à interdire la culture de maїs transgénique au Mexique

Selon Martín Velázquez, porte-parole de la campagne Sin maíz no hay país, la souveraineté alimentaire implique la défense du mode de vie paysan et de l’environnement, ainsi que la préservation du patrimoine territorial. Elle touche le droit des paysans, des peuples autochtones et des consommateurs d’exiger et de définir des politiques alimentaires, et non de se les faire dicter.

Dans l’Etat du Chihuahua le ton monte entre la Communauté Mennonite cultivant des OGM et les représentants locaux de la campagne « Sin maíz no hay país », dont Victor Quintana aussi affilié à Via Campesina, qui menacent de faucher les champs de culture illégale sur les terres mennonites. Les membres de la campagne civile estime que « cette expérience » conduirait à la « production de dizaine de millions de grains dont chacun représente une menace directe pour le maїs local. » Le ministère de l’agriculture mexicain voit cette « expérience » comme la possibilité d’évaluer les distances de dispersions du pollen par le vent et ainsi déterminer des distances de sécurité pour éviter la contamination génétique des espèces locales.

La dispersion du pollen par le vent est déjà considérée responsable pour la contamination du maїs dans l’Etat voisin du Sinaloa, une région frontalière avec les Etats-Unis, où Greenpeace a conduit des tests en 2007 montrant des traces de maїs transgénique dans 96% des échantillons prélevés dans neuf municipalités. Le Sinaloa est le premier Etat producteur de maїs du Mexique. Aleira Lara, la coordinatrice de la campagne OGM de Greenpeace Mexique, considère que le confinement des cultures OGM à certaines régions est « illusoire et cosmétique ». L’année dernière Greenpeace a relevé 39 cas de contamination génétique par le vent dans quelques 23 pays.

Le Mexique est donc aujourd’hui au cœur de la tourmente OGM et la victime des pressions exercées par Monsanto et les firmes de biotechnologie mettant en œuvre toutes les méthodes déjà éprouvées dans le reste de l’Amérique Latine. La Société Civile mexicaine, à travers la campagne « Sin maíz no hay país », a démontré sa capacité de rassemblement et de protestation afin de défendre la « souveraineté alimentaire » et la culture du pays. Cependant, cela sera-t-il suffisant pour empêcher les politiciens du pays, dont la réputation vénale n’est plus à faire, d’ouvrir les vannes de l’invasion OGM ? Le Combat continue.

Sources journalistiques :

Killing Farmers with Killer Seed de John Ross pour Counter Punch, juin 2008
The DNA of Corn : Mexican Peasants vs. Techno-science pour la Fondation Miller-Mc Cune, juin 2008
La souveraineté alimentaire au Mexique : Sin maíz no hay país pour Alternatives, juillet 2008



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29 juillet 2008 2 29 /07 /juillet /2008 03:13



Cet article présente le rapport sur le maïs de Monsanto MON863 publié en juin 2005 du CRIIGEN, un comité scientifique indépendant, dirigé par le Pr Seralini.

Ce rapport a joué un rôle important dans la remise en cause du processus scientifique de l’Union Européenne pour l’obtention de d’homologation pour les OGM commerciaux.

Aujourd’hui, la Commission Européenne a reconnu la faiblesse de son dispositif de contre-expertise scientifique. Le 3 juin dernier, les ministres européens de l’Environnement se sont prononcés en faveur d’une réforme de la procédure d’évaluation et d’autorisation des OGM. Ils ont reconnu que la transparence et l’efficacité devaient être améliorées pour garantir un meilleur niveau de sécurité alimentaire pour les citoyens européens.

Présentation du Comité de Recherche et d’Informations Indépendantes sur le Génie Génétique.

Le CRIIGEN est un Comité de Recherche et d’Information Indépendantes sur le génie Génétique. Il s’agit d’un comité apolitique et non-militant d’expertise, de conseil, indépendant des producteurs d’OGM, intervenant à différents niveaux : juridique, scientifique (santé, environnement), sociologique, technique (étiquetage), notamment pour des dosages d’OGM, et au niveau économique. Le Pr Gilles Eric Séralini - Professeur de biologie moléculaire à l’université de Caen - est Président du Conseil Scientifique du CRII-GEN (Comité de Recherche et d’Information  Indépendantes sur le Génie Génétique) depuis 1999. Il a été nommé, en 2003, expert à la Commission Européenne pour préparer le dossier défense dans l’affaire qui oppose Etats-Unis/Argentine/Canada (qui produisent 95% des OGM) à l’union Européenne à l’OMC, sur le dossier moratoire commercial OGM. Il a publié de nombreux ouvrages disponibles en librairie sur le débat autour des OGMs.

Visitez le site du CRIIGEN.org pour plus d’information.

Article : Effets controversés sur la santé après des tests sub-chroniques de toxicité : une étude confidentielle de 90 jours avec des rats nourris aux OGM. par Gilles Eric Seralini

INTRODUCTION

Rappel d’information : Le MON 863 est un maïs OGM de première génération, seconde catégorie c’est-à-dire génétiquement modifié pour produire un pesticide. La première génération d’OGM cultivée en plein champ depuis 1995, soit tolère un pesticide pour la première catégorie (72% d’OGM tolèrent par exemple principalement l’herbicide Roundup, comme le maïs NK 603 de Monsanto) ou produit un pesticide pour la seconde catégorie (généralement aux environs du kg/ha, comme la toxine artificielle Bt que l’on trouve dans le maïs MON 863 ou le MON 810 ; ces différents insecticides sont produits par 20% des OGM). La seconde génération d’OGM (8% au total) développée depuis 1998 fait les deux : produire et tolérer un pesticide. Une grande majorité des OGM commercialisés en agriculture a ainsi été créée pour contenir des pesticides qu’ils absorbent et/ou produisent (le reste constituant moins de 1%). La troisième et la quatrième génération seront sans doutes créée afin de produire deux insecticides et tolérer un ou deux herbicides.

Description du MON 863 : Les modifications génétiques sont insérées dans une construction génétique artificielle, appelées le transgène, par bombardement de particules couvertes de cet ADN nouveau dans le génome du maïs à partir de cellules immatures. Ces cellules ont régénéré de nouvelles plantes transformées, appelées OGM. Tout le monde est unanime sur le fait que la trangenèse peut créer des effets de mutagenèse insertionnelle qui ne seraient pas visibles par analyse de la composition chimique ; cette dernière analyse par " équivalence substantielle " peut par définition seulement être partielle. D’un point de vue réductionniste, l’hypothèse envisagée est qu’une modification  génétique artificielle par bombardement de particules (ou par une méthode équivalente) ne crée pas plus de risque de mutagenèse insertionnelle que des effets génétiques inattendus qui seraient provoqués par hybridation classique. Cette hypothèse n’a toujours pas été démontrée, mais a été utilisée pour éviter l’étiquetage et les études à long terme sur les OGM en Amérique du Nord.

Dans notre dossier en question, la modification génétique a été réalisée pour atteindre trois buts différents :

1- Produire une variante d’un insecticide artificiel appelé Cry3Bb1 par le plant de maïs (49-96.5 µg/g) tout au long de son développement, et dans tous ses organes (le promoteur ubiquiste adapté 35S est utilisé dans la construction génétique). La toxine est mesurée dans les grains par Monsanto. Cette toxine est créée contre les insectes coléoptères comme Diabrotica. Diabrotica vient d’une famille d’insectes très dangereuse pour une grande partie
des cultures, et était absent des pays européens jusqu’en 1990, interdit même dans les laboratoires (Diabrotica virgifera virgifera) car il est très difficile de l’éliminer par des insecticides chimiques connus. Il semblerait qu’il soit apparu pendant la guerre des Balkans en provenance des Etats Unis : depuis il a atteint les pays de l’Europe de l’Ouest comme la France et l’Italie (en 2000), probablement par avion (aux alentours des aéroports militaires).

Monsanto semble avoir anticipé ce problème : en effet la compagnie a développé, il y a quelques années, en essai en plein champ, un maïs transgénique tentant de contrôler cet insecte avant son arrivée en France. Cette étape d’expérimentation est nécessaire pendant plusieurs années avant la commercialisation dans un pays. Le mécanisme moléculaire d’action de la toxine n’est pas précisément connu, ni le récepteur liant la toxine dans  
l’intestin de l’insecte. La spécificité de l’action est généralement hypothétique ; mais aucun article n’a été publié  sur l’action de cette toxine sur les cellules humaines et des controverses existent à ce niveau. Monsanto n’est pas capable de produire des tests de toxicité avec la toxine extraite du maïs qui a été mise en contact avec l’épithélium digestif humain. Il apparaît, suivant les considérations théoriques et les données préliminaires des expériences de toxicité aiguë pendant plusieurs jours, chez un très petit nombre de rongeurs, que la toxine ait été exemptée d’analyse de toxicité sérieuse. Dans ce contexte, le résultat de cette étude confidentielle de 90 jours sur rats est d’une extrême importance car c’est la meilleure façon d’avoir une idée de l’activité de la toxine chez le mammifère, ou de connaître d’autres effets inattendus de la modification génétique.

2- Pour faciliter économiquement la sélection du maïs, Monsanto a utilisé et maintenu au sein des plants GM gène marqueur de résistance à un antibiotique appelé NPTII (néomycine phosphotransferase II). Ce dernier produit dans la cellule végétale une protéine qui induit une résistance à la Kanamycine, antibiotique bien connu. Ceci est aussi une signature de la première génération d’OGM qui a été faite rapidement, avec peu de considération des problèmes suivants. La résistance aux antibiotiques est reconnue pour être un problème de santé majeur dans de nombreux pays, dû au développement grandissant dans l’environnement et chez l’humain des gènes de résistances aux  antibiotiques. Ce phénomène est amplifié par l’utilisation abusive des antibiotiques selon la communauté scientifique, laquelle s’accorde à limiter de nos jours leur utilisation.

Dans ce contexte, il apparaît très étrange de promouvoir une nourriture contenant une résistance aux antibiotiques, surtout que Monsanto a déjà développé des maïs transgéniques sans cette sorte de gène marqueur. Cela est vrai même si la compagnie dit que cette résistance a peu de chance de se répandre par ce genre de cultures OGM et que cela aurait très peu d’effet sur la santé humaine et animale. Ce fait n’est pas prouvé par des expérimentations bien étayées. Cela pourrait jeter un doute dans l’esprit des citoyens sur le véritable but de cette compagnie concernant la protection de la santé ; d’autant plus que cet état de fait n’est pas favorable au développement des biotechnologies en général, lesquelles ont été hautement promues par la politique des états membres de l’Union Européenne, et ont reçu de très importants soutiens financiers.

3- Le MON 863 est aussi un parent transgénique pour d’autres OGM car plusieurs applications peuvent concerner des hybrides avec le MON 863, voir d’autres caractères GM comme le MON 863 X MON 810 produisant deux insecticides différents (nouvelle génération). Bien que le MON 863 donne sa toxine CryBb1 aux plants MON 863 X MON 810, les deux plants sont génétiquement différents et ne sont pas, a priori, directement comparables pour leur toxicité. Les effets combinés des deux insecticides ne sont pas à exclure.

RESULTATS

Tous les comités scientifiques consultés sont unanimes avec Monsanto, pour affirmer que les statistiques montrent des différences significatives (résumées ci-dessous) pendant cette étude de 90 jours entre les contrôles et les rats traités (avec des OGM) sur de nombreux paramètres incluant la composition du sang, et des organes de détoxification comme les reins. L’EFSA indique à ce niveau : " des différences sont observées dans les paramètres hématologiques, comme la totalité des globules blancs, et le nombre de lymphocytes et de basophiles " ; " à la fin de l’étude, des différences statistiques significatives ont été observées dans le nombre de réticulocytes entre les animaux femelles nourris avec 33% de MON 863 et ceux alimentés avec les lignées de maïs contrôles et références ". l’EFSA ajoute : " Les poids des reins des rats nourris avec le régime comprenant 33% de MON 863 ont été statistiquement significativement plus bas que ceux nourris avec le régime contrôle ", " une incidence significativement plus faible des tubules rénaux minéralisés a été notée pour les rats nourris avec 33% de MON 863 comparés avec ceux du maïs contrôle ". Les effets significatifs comparés aux contrôles sont aussi observés avec d’autres OGM tolérants au Roundup, avec en tout au moins quatre OGM pour lesquels ces tests ont été faits et où l’on a retrouvé des ressemblances classiques avec les effets des pesticides en toxicologie. Cela a été aussi observé avec le maïs MON 810 qui produit un autre insecticide. : " avec les rats nourris à 33% avec du maïs MON 810, une baisse significative du rapport d’albumine/globuline a été observée par comparaison avec les contrôles et les groupes références à la fin de l’étude. " Par ailleurs, les discussions publiques de la CGB rapportent une inflammation et une régénération anormale des reins des mâles nourris avec le MON 863, et une augmentation significative de la glycémie chez les femelles.
Des comités scientifiques en Autriche, Italie, France, Espagne, Suède et Hollande, en particulier, ont questionné Monsanto sur la toxicité et les allergies de ce maïs ou du MON 810, mais aussi des deux MON 863 x MON 810 après la transmission des données par la compagnie, alors que le temps d’évaluation des documents était très court.

DISCUSSION

Interprétation des données ci-dessus : La plupart des différences significatives ont été jugées comme " sans signification biologique " par Monsanto et consécutivement par des comités scientifiques cités ci-dessus à la majorité, après d’importants débats et réunions. Les résultats relevaient l’intérêt mais leur interprétation restait la cause de désaccords. Certains des derniers votes ont été réalisés avec un tout petit nombre de toxicologues, et aucun d’eux n’a eu accès à notre connaissance, aux coupes histologiques des organes, excepté les experts choisis par la companie Monsanto.

Quoi qu’il en soit, les arguments principaux de la discussion en faveur de l’absence d’effets toxiques étaient :

1. La comparaison avec des groupes de rats " références " qui n’ont pas mangé les mêmes lignées de maïs que le maïs GM. Au contraire, le groupe " contrôle " était nourri avec un maïs génétiquement très proche du groupe traité à l’OGM, la différence dans l’alimentation étant considérée dans ce cas-ci, comme résidant essentiellement dans le transgène, son expression en protéine et ses conséquences seules. Ceci est une pratique courante avec les tests des OGM. Le groupe " référence " total était au moins six fois plus important que le groupe nourri aux OGM (dans  certain cas, les données historiques du laboratoire pratiquant ces expérimentations servent aussi comme référence dans certains dossiers).

2. Pour certains effets significatifs, les effets différentiels entre les mâles et les femelles permettaient de dire que le problème n’était probablement pas lié à l’OGM.

3. Pour d’autres effets significatifs, leurs observations, seulement à certaines semaines de l’expérience, ont servi à les éliminer de la discussion de leur signification biologique.

4. Pour d’autres effets significatifs, l’absence de corrélation avec les doses ingérées par les rats était une raison d’annuler leur lien avec les OGM.

Au contraire, d’autres experts internationaux, après consultation peuvent considérer que :

1. L’analyse statistique a pu rencontrer des problèmes dans le choix de la méthodologie ou des biais inattendus et devrait être refaite. Cela est proposé par le CRII GEN après obtention des données brutes. L’analyse statistique insuffisante a été admise dans certains cas.

2. Les différents effets d’un traitement par un composé toxique sur des mâles et des femelles sont souvent observés, ceci peut être dû aux différences enzymatiques et hormonales entre les deux sexes au cours de la détoxification.

3. Les effets passagers après une intoxication chimique ou biologique sont aussi nombreux, et cela ne signifie pas pour autant que le composé est sans danger sur le long terme.

4. Les effets relatifs aux doses ne doivent pas être les seuls à être considérés en toxicologie. Par exemple, la plupart des effets hormonaux ne sont par forcément proportionnels à la dose, mais peuvent présenter des effets biphasiques ou de rétroaction, et aussi dépendre de la période d’administration.

CONCLUSION

Il peut donc être conclu qu’aucune étude de toxicité indépendante n’a été faîte en parallèle de celle dirigée et interprétée par la compagnie Monsanto. De plus, l’interprétation des données peut être controversée. Il n’y a aucun accès aux organes des rats traités ou de coupe histologique de ces organes. Il n’y a jamais eu aucune autre expérimentation après discussion. Seulement de nouvelles analyses et interprétations sur les mêmes données du MON 863 par des experts désignés par Monsanto.

De plus, par exemple jusqu’à des années récentes et pour tous les OGM, le soit disant expert extérieur indépendant qui a été le seul payé par le gouvernement français pour être rapporteur à la CGB était choisi, selon une règle écrite et pendant de nombreuses années, par la compagnie elle-même dans les propositions qui lui étaient faîtes. Même si cela n’est pas toujours le cas aujourd’hui, il devrait être vérifié si cette pratique est courante pour les autres états membres ou l’Union Européenne.  
Toutes ces pratiques évitent une expertise contradictoire similaire aux procédures judiciaires, alors que cela pourrait être organisé facilement. Le secret sur les données brutes demandé par Monsanto n’a pas de base scientifique ; toutes les données scientifiques doivent être publiées ou transparentes telle qu’elles sont dans les dossiers de demandes de mises sur le marché aux états membres, ainsi qu’il est fait pour les résultats de la recherche publique, quand les OGM sont destinés à la consommation humaine.

La Directive CEE/2001/18 indique que l’évaluation des risques sur la santé et l’environnement pour les OGM devrait être publique. Quels que soient les résultats, dans un tel cas de controverse, le minimum pourrait être comme dans la recherche publique, de refaire les expériences puisque aucune conclusion claire ne peut être réalisée à partir de ces données. Le CRII GEN propose de refaire de nouvelles études, aussi plus longues et sur deux générations de  rats. Pour cela un support financier est demandé ; le protocole est rédigé selon les standards de l’OCDE.

Si nous comparons les OGM avec d’autres produits testés pour leur sécurité, le meilleur exemple serait pour les pesticides, puisque le MON 863 a été génétiquement modifié pour produire un pesticide. La législation européenne concernant les pesticides a longtemps été dirigée par la Directive CEE/91/414, et toutes ses nouvelles adaptions. La législation précise que, concernant les études de toxicité des pesticides dans la nourriture humaine et animale, trois  mois de tests devraient être faits sur trois espèces différentes (généralement rats, souris et chien), et que les pesticides doivent être donnés au moins un an à une espèce (généralement le chien) et durant deux ans à une autre espèce (généralement le rat, ce qui correspond à peu près à sa durée de vie).

Il n’y a aucune raison scientifique d’éviter de faire des tests comparables pour les OGM actuels. Les tests in vivo constituent une étape de sécurité finale qui devrait être réalisée pour des produits inconnus qui ne présentent aucun effet négatif in vitro. Cependant, les tests spécifiques in vitro devraient être stimulés auparavant, et tout le monde sait qu’il y a encore beaucoup à faire dans l’amélioration des dossiers OGM à ce niveau, c’est-à-dire plus de tests avec la toxine Bt artificielle Cry3Bb1 extraite du maïs incubée avec des cellules humaines, dans ce cas-ci, par exemple.

Dans l’exemple du maïs MON 863, il est intéressant de noter que l’étude de toxicité de 90 jours sur rats est la meilleure et la plus longue qui n’ait jamais été réalisée sur des mammifères. On découvre des effets significatifs en comparaison aux animaux de contrôles de laboratoire, et dans certains cas en comparaison avec le " groupe de référence ", qui recouvre une notion très large et dont la validité peut être questionnée.

Dans tous les exemples il est recommandé que :

1. Les analyses statistiques soient refaites par des experts indépendants et les tests soient visibles sur Internet pour toute la communauté scientifique,

2. Les expérimentations soient recommencées si des effets significatifs apparaissent et comparées avec le bon groupe de contrôles,

3. D’autres expérimentations soient pratiquées pendant un an ou deux sur rats, et avec deux autres espèces de mammifères, de façon à pouvoir étudier les effets potentiels nuisibles de la modification génétique. Mais aussi pour savoir s’il y a un lien avec la présence de la toxine Cry3Bb1, comme il est souvent pratiqué avec d’autres pesticides. Les OGM ne devraient pas être exemptés de toute évaluation comparable aux pesticides chimiques s’ils contiennent des pesticides ou des métabolites spécifiques de pesticides. Ce qui est à l’évidence le cas pour le MON 863.

4. Les études in vitro doivent être faites avec la toxine Cry3Bb1 extraite du maïs et testées sur de nombreuses cellules de mammifères incluant l’épithélium digestif humain et les hépatocytes

En l’absence de tels résultats, l’accord donné pour cultiver ce maïs en champ ouvert, pour l’alimentation humaine ou animale, peut présenter des risques sérieux pour la santé, et a commercialisation de ce maïs devrait être interdite. On doit aussi souligner qu’aujourd’hui aucune compagnie n’est légalement obligée d’accomplir un nombre et une durée précise d’études sur des mammifères nourris aux OGM. Ce manque de précision (souligné encore dans les résultats du projet Entransfood Européen) est difficile pour les autorités publiques et les compagnies. Pour le public, il est tout à fait normal de donner des OGM à manger au moins deux ans à des rats avant de nourrir toute la population durant toute leur vie, incluant les enfants, les personnes âgées et les malades. Standardiser les tests des OGM en Europe sur trois espèces de mammifères, pendant trois mois à deux ans, pourrait finalement aider les compagnies à avoir des standards homogénéisés et pour commercialiser de la nourriture de bonne qualité. Les biotechnologies  seraient plus acceptables dans de telles conditions.


[1] DOCUMENTS UTILISES POUR CE RAPPORT

Pour ce rapport, nous avons comparé et compilé quatre sortes de documents :

1. des documents du domaine public comme les rapports de l’EFSA et de l’AFSSA,

2. des articles scientifiques issus de journaux internationaux. Cette littérature est citée sur www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed mais aussi dans l’ouvrage intitulé " Ces OGM qui changent le monde ",

3. des dossiers fournis par Greenpeace et non confidentiels,

4. des rapports non confidentiels obtenus par le CRII GEN www.crii-gen.org du gouvernement français après en avoir demandé l’autorisation à la CADA (Commission d’accès aux Documents Administratifs), données considérées publiques. Ces rapports sont rédigés par Monsanto et on y trouve des questions posées par les différents états membres sur la toxicité du MON 863 en particulier.

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15 juillet 2008 2 15 /07 /juillet /2008 03:27
Les révoltes de la faim, conséquences naturelles de la mondialisation
Par Aurélien Bernier

Dès le XVIIIème et le début du XIXème siècle, les économistes Adam Smith et David Ricardo avaient décrit un phénomène d'une logique imparable : la baisse du prix des denrées alimentaires permet d'augmenter le pouvoir d'achat des salariés sans avoir à augmenter leurs salaires. Par voie de conséquence, cette baisse est vivement souhaitable pour les propriétaires des grands moyens de production. Règle numéro un du parfait libéral : la nourriture doit être bon marché.


Dans ses travaux, le même Ricardo élabore la théorie des avantages comparatifs, qui conclut à l'intérêt qu'aurait chaque pays à se spécialiser dans les types de production pour lesquels il se montre le plus performant. Peu importe que cette spécialisation rende dépendant d'autres pays producteurs, le libre-échange permet aux marchandises de circuler et aux peuples de satisfaire leurs besoins. Règle numéro deux : il faut renoncer à la souveraineté alimentaire et industrielle pour se convertir au libre-échange.


La stratégie de mondialisation permise par le développement fulgurant des réseaux de transport et de communication n'est jamais que la mise en oeuvre à marche forcée de ces principes par les puissances économiques. Tous les moyens auront été bons pour y parvenir. Le GATT puis l'OMCi propageront le libre-échange un peu partout sur la planète, y compris dans le domaine agricole. Lorsque les négociation patinent à l'OMC, comme c'est le cas depuis quelques années, des accords régionaux ou bilatéraux prennent le relais et appliquent les mêmes recettes. Sans oublier les Plans d'ajustement structurels imposés aux pays emprunteurs du Fonds monétaire international (FMI), qui déclinent encore la doctrine néolibérale. En bout de course, les vrais bénéficiaires de ce libre-échangisme débridé sont les grandes entreprises, qui peuvent profiter des conditions sociales, fiscales et environnementales les plus avantageuses et niveler par le bas les législations grâce à l'argument massue de la concurrence internationale.


De plus, la financiarisation croissante de l'économie démultiplie les conséquences de cette réorganisation. Le pouvoir exorbitant des marchés généralise la spéculation, y compris sur les produits alimentaires. Le « marché mondial » fixe les prix, fonction de l'offre et de la demande... mais aussi (et de plus en plus) des perspectives de rendement financier. Pour s'en convaincre, on peut admirer la transparence de la banque belge KBC qui, pendant les révoltes de la faim, vante les performances d'un produit financier investi dans les matières premières agricolesii.


Ainsi, on comprend mieux comment cette mondialisation qu'on nous prédisait heureuse a pu conduire à la situation de pénurie alimentaire vécue en ce moment même par de nombreux pays. Spéculation provoquant une hausse brutale des prix, répartition totalement inéquitable des richesses, dépendance des pays du Sud vis-à-vis du Nord...voilà les ingrédients de la crise. On peut bien-sûr ajouter un choix technologique désastreux comme celui des agro-carburants, qui confirme l'hérésie du système économique mondial en détruisant des aliments pour produire de l'énergie.


Face à la révolte de populations qui ne parviennent plus à payer leur nourriture, les institutions sont dans l'embarras. Elles accusent la hausse de la population, la croissance de la Chine et de l'Inde ou le changement climatique, et préconisent d'augmenter l'aide alimentaire. Les plus téméraires reconnaissent tout juste des effets pervers dans la stratégie internationale et se souviennent que les subventions des pays riches à leur agriculture provoquent un dumping terrible dont sont victimes les pays en développement. Egale à elle-même, la Banque Mondiale s'oppose à l'arrêt des exportations de produits alimentaires par les Etats les plus touchés par la famine au motif... que cette mesure provoquerait une nouvelle augmentation des cours sur les marchés ! En d'autres termes, pour sortir de la crise, laissons mourir les pauvres.


On applaudira enfin la commissaire européenne à l'agriculture, Mme Mariann Fischer Boel, qui estime que les prix élevés sont « une bonne chose pour les producteurs »iii et qu'un développement plus rapide des organismes génétiquement modifiés (OGM) limiterait la crise. Toutes les démonstrations ont pourtant été faites et maintes fois répétées pour tordre le cou à ce dernier argument. Protégés par brevets et conçus pour une agriculture intensive basée sur la chimie, les OGM sont un désastre de plus pour les pays en développement. Environ 80% des surfaces cultivées dans le monde avec ces variétés sont d'ailleurs destinés à la nourriture du bétail consommé dans les pays riches. Et, à supposer que certains OGM apportent une amélioration en terme de rendement (ce qui reste à prouver), les faits démontrent que les causes de la malnutrition sont bien politiques, et qu'augmenter la production ne modifiera en rien la situation.


Une diversion aussi ridicule n'a visiblement qu'un objectif : celui d'occuper le terrain médiatique. Car, pour les tenants de l'ordre économique international, le risque que les citoyens tirent les véritables conclusions de cette situation est grand. Et ces conclusions sont sans appel. Le libre-échange est un désastre au Sud comme au Nord. Reconstruire la souveraineté alimentaire et industrielle des Etats est la seule voie possible pour sortir d'une logique de concurrence et s'engager dans une logique de coopération et de solidarité. Pour cela, il faut fermer la bourse, contrôler les importations et les investissements, taxer les profits... bref, remettre l'économie sous contrôle politique. Si elle était analysée pour ce qu'elle est, cette crise alimentaire devrait signifier la mort clinique de l'idéologie néolibérale.



iGATT : Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, signé le 30 octobre 1947 pour harmoniser les politiques douanières des parties signataires. Cet accord multilatéral de libre-échange entra en vigueur en janvier 1948 et aboutira en 1994 à la création de l'Organisation Mondial du Commerce (OMC).

iii« Hausse des prix agricoles: bonne chose pour les producteurs », AFP, 18 avril 2008.

 
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